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Croyance populaire dans un pays confucéen

#Aux sources de la musique coréenne l 2022-01-06

Aux sources de la musique coréenne

Croyance populaire dans un pays confucéen

Une petite commune rurale dans la région montagneuse de Gangwon vient d’accueillir un condamné à l’exil, un certain Nam Gu-man, un ancien haut dignitaire de Joseon. Nous sommes vers le milieu du XVIIe siècle où le monde politique du pays est marqué plus que jamais par les querelles de coteries. Nam en a justement été victime pour perdre la faveur de son roi, et se retrouver ainsi à mille lieues de la capitale, loin de sa famille.


Ce pauvre exilé, forcé de vivre dans un environnement austère, n’a cependant point changé ses habitudes. Il se lève toujours tôt le matin. Lettré confucéen comme doit l’être toute personne désireuse de devenir bureaucrate au royaume de Joseon, il passe sa journée à lire les classiques chinois et à ruminer l’enseignement de Confucius. Et, une autre habitude d’un confucianiste, il ne cesse de faire la morale à son entourage, aux enfants et adolescents du village pour lesquels il a ouvert une école, mais aussi aux adultes, paysans pour la plupart. Il a sans doute trouvé bon de les édifier via un poème moralisant, facile à retenir grâce à sa musicalité. En voici un qui nous est parvenu et qui met en garde contre la paresse :


Le soleil s’est-il levé ? Les alouettes gazouillent

 Le jeune paysan est-il toujours au lit ?

 La journée est courte pour tracer de longs sillons


Rappelons que les confucianistes de Joseon étaient rationalistes au point de mépriser le bouddhisme, la religion la plus populaire dans leur pays, qui n’était pour beaucoup d’entre eux qu’une pure superstition. En fait, leur Maître n’a jamais parlé de l’au-delà, ni du paradis, ni de l’enfer. Une anecdote à ce sujet est assez bien connue.


Un jour, un élève de Confucius demanda à son maître : « Que devient-on après la mort ? » Le Sage répliqua : « A combien s’élève le nombre de poils de tes sourcils ? » « Je l’ignore », répondit l’élève. Son maître dit alors : « Tu es même ignorant de ce qui se trouve tout près de tes yeux. Pourquoi veux-tu connaître ce qui est infiniment loin de toi ? »


Mais les gens du peuple dans le royaume confucéen de Joseon, comme ils sont superstitieux ! Quand le jour se lève, ils prient le soleil de les protéger contre les mauvais esprits. Quand la nuit tombe, c’est cette fois la Lune qui est leur protectrice. Une haute montagne, un grand arbre ou un énorme rocher, tout ce qui leur inspire une magnificence, est censé pour eux être doté d’une puissance surnaturelle. Notre confucianiste, Nam Gu-man, ayant comme nouveaux voisins ces gens convaincus de l’immanence des esprits, bons ou mauvais, dans le monde, se seraient bien moqués d’eux, notamment face à certaines de leurs coutumes liés au Nouvel an.


Une pratique en la matière à la fois absurde et amusante : le Jour de l’an, chaque foyer accroche une passoire sur la porte de leur demeure. Elle est censée protéger la maison contre le mal. Comment cela ? Eh bien, un mauvais esprit tentant de pénétrer dans la maison trouverait cette passoire et en compterait le nombre d’orifices. Avez-vous jamais essayé cela ? Victime de troubles de la vue, il vous aurait fallu recommencer le compte infiniment, ce qui arriverait également au visiteur indésirable et invisible du Nouvel an. Occupé par son compte, il ne songerait plus à entrer dans la maison.


Quant à une autre coutume du Jour de l’an, elle pouvait rendre de mauvaise humeur notre confucianiste partageant sans doute avec beaucoup d’autres adeptes du confucianisme le mépris à l’égard du bouddhisme : l’invitation d’un moine pour la lecture du soutra, une pratique afin de prier pour le bonheur. Un chanteur de gukak pouvait se trouver dans l’auditoire pour que la récitation mélodieuse lui inspire un chant.


La demeure de notre exilé ne pouvait certainement être comparée en rien avec la maison qu’il habitait dans la capitale, une grande villa digne d’un haut dignitaire. Elle devait tout de même être munie d’une cuisine. Mais oui, même une personne qui se nourrit quotidiennement de la parole de Confucius a besoin de manger trois fois par jour. La cuisine, un endroit pratique, certes, mais notre confucianiste ne partageait certainement pas une croyance populaire concernant ce lieu, à savoir le culte de Zowang, dieu du fourneau qui veille à la sécurité alimentaire de la maisonnée. Son autre rôle est de surveiller la conduite, gestes et paroles, des membres de la famille. Une fois par an, il monte au ciel pour en faire un rapport au dieu suprême. Histoire de l’amadouer sans doute, la coutume veut que le jour de son départ, aux alentours du Nouvel an, la maisonnée brûle de l’encens et prépare des offrandes. A une pareille occasion, la musique ne manque bien sûr pas.


Liste des mélodies de cette semaine

  1. « Le soleil s’est-il levé ? » chanté par Yi Dong-kyu.
  2. « Prière pour le bonheur » chanté par Kim Yu-ri.
  3. « Le Jeu de Zowang » chanté par Cho Sang-young.

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