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Steel Rain 2 : des pets et des hommes

2020-08-12

Séoul au jour le jour


Voici donc venu le temps de « Steel Rain 2 », une sorte de sequel basé sur le premier film du même titre et du même réalisateur très bavard Yang Woo-seok. Vu le premier film, on s'attendait aux discours géopolitiques à la manière des vieux James Bond et à de l'action façon studio d'Hollywood, mais ce qui est inattendu vient de l'ironie potache à la manière du président américain qui sert à tirer le portrait de nos chers dirigeants.


* Un sommet dans les profondeurs

L'intrigue du film n'est pas aussi complexe qu'elle n'y paraît, il ne sera pas nécessaire d'appeler un herméneuticien ou un cabaliste pour déchiffrer les messages secrets du film. Tout est dit dès le début dans de longs dialogues dont le réalisateur avait raison de s'inquiéter. Il s'agit donc d'abord d'une montée des tensions entre la Chine et les Etats-Unis, ce qui engage le Japon et les deux Corées. Un sommet est alors organisé à Wonsan, en Corée du Nord, entre le numéro un américain (joué ironiquement par l'Ecossais Angus Macfadyen) et le leader suprême nord-coréen joué par Yoo Yeon-suk. Jung Woo-sung joue le sémillant président sud-coréen chargé de la médiation. Mais voilà qu'un coup d'Etat est fomenté par le méchant Kwak Do-won contre l’homme fort de Pyongyang. En fait, tous les trois dirigeants se retrouvent cloîtrés dans un sous-marin dont – ça se complique - le capitaine joué par Shin Jung-geun est resté fidèle au leader suprême. Bref, un huis-clos sartrien pouvait avoir lieu si le film ne choisissait la caricature et l'humour de comptoirs pour ce faire.


* Une obsession

C'est bien du côté des intentions du réalisateur et scénariste (auteur aussi du webtoon qui a inspiré les deux films) qu'il faut se tourner. Les producteurs de Lotte Entertainment ne s'y sont pas trompés en mettant Yang Woo-seok en première ligne pour la promo du film et les interviews. Yang est persuadé que la fin de la Corée du Nord viendra d'un coup d'Etat interne. Les deux films et sa BD illustrent cette situation sous diverses variantes. Ne doutons pas des talents de géopoliticien du réalisateur-dessinateur ; ses idées se distinguent cependant de l'option d'un soulèvement populaire (voir le film interdit en Corée du Sud « The Interview » pour cela) et de l'option d'une action américano-chinoise en Corée du Nord. En tout cas, il élimine, en creux, l'habituelle vision d'un Nord condamné à s’effondrer tout seul pour cause de famine et de délitement économique. 


* A contre-temps

Si le premier « Steel Rain » était tombé au bon moment en surfant sur le réchauffement des relations Nord-Sud, le second volet semble agiter des préoccupations déjà passées de mode. En pleine pandémie globalisée, le Nord a soufflé le chaud et le froid, laissant de côté toutes velléités de rencontre au sommet. Le réalisateur insiste, pourtant, pour impliquer les USA et la Chine dans les affaires inter-coréennes ; par exemple, en permutant les rôles de nordistes et de sudistes entre le premier et le second film : comprenez en montrant que des deux côtés de la DMZ les gens sont pareils mais que la vérité est ailleurs. Mais ailleurs aussi, du côté chinois ou américain, les relations inter-coréennes ne semblent plus une urgence. C'est le risque des films surfant sur l'actualité dont les productions sud-coréennes sont capables : ils peuvent toucher très vite un public sensibilisé à chaud ; mais ils peuvent aussi, s'ils sont trop retardés - comme cela a été le cas pour « Steel Rain 2»- tomber à contre-temps.


Notons, enfin, qu'après deux films de zombies, « #Alive » et « Peninsula », « Steel Rain 2 » est le troisième blockbuster à tenter de ramener les spectateurs dans les salles cet été. Si les deux films de zombies avaient un caractère international très net et un monopole quasi total des écrans permettant de sécuriser les investissements même en cas d'échec au box office local - ce qui n'a pas été le cas puisque « Peninsula » est à presque 3,5 millions d'entrées et que « #Alive » est à près de 2 millions - il n'est pas aussi assuré de voir « Steel Rain 2 » obtenir le même résultat face au COVID-19. Le danger communiste est-il plus fort que celui du nouveau coronavirus dans l'esprit des spectateurs ?

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