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Quand on dit « été »

« La cigale ayant chanté tout l’été se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue... » On peut s’amuser à dire que cette fable bien connue est une revanche d’une personne qui a été embêtée durant tout l’été par le bruit fracassant de la cigale. « Fais-moi taire ce maudit insecte ! » pouvait-elle hurler sans avoir pu trouver le sommeil à cause du vacarme infernal. En fait, la cigale ne se repose pas, même la nuit. Dans la fable, elle dit à la fourmi qui lui demande ce qu’elle faisait durant les fortes chaleurs : « Nuit et jour à tout venant je chantais, ne vous déplaise ».


Il n’est cependant pas correct de dire que les cigales chantent, d’autant que le son n’est pas produit par la bouche, mais par une sorte de membranes situées sous les ailes, appelées les « cymbales ». Oui, les cigales, exclusivement les mâles, cymbalisent, à savoir émettent des sons pour attirer les femelles. Ce que nous appelons « chant des cigales » est en réalité un appel nuptial, lancé « à tout venant » comme le précise le personnage de la fable. Ayant passé plusieurs années dans le sol à l’état de larve, les cigales, sorties de terre, n’ont que quelques semaines à vivre et, semble-il, veulent en profiter au maximum. Et c’est bien en ce sens que l’auteur anonyme d’un chant de Seodo, c’est-à-dire de la région nord-ouest de la Corée, interprète le chant des cigales, « saleum-saleum », « cri-cri » en français :


 Saleum-saleum, pourquoi chantes-tu ?

 Déplores-tu l’absence de ton amour ?


Laissons les cigales cymbaliser. Suivons ces Coréens d’une autre époque ignorant la clim et fuyant la canicule. Où vont-ils ? Vers une rivière. Pour se baigner ? Pas tout à fait ; ils ne vont tremper que leurs pieds dans l’eau. Le maillot de bain est également inconnu à cette époque. C’est à une tout autre activité qu’ils vont se livrer pour oublier la chaleur : « cheonryeop », la « chasse dans l’eau » selon la traduction littérale, un mot élégant pour dire « pêcher le poisson ».


Certains d’entre eux sont effectivement munis de filet de pêche, d’autres de différents ustensiles, en particulier une grosse marmite. Eh oui, ils vont pêcher et, avec les poissons attrapés, vont préparer une soupe sur place.


Cette soupe, appelée « eojuk », est extrêmement épicée. En la mangeant, on transpire énormément. Un moyen de lutter contre la chaleur, dit « iyeol chiyeol », « combattre la chaleur par la chaleur ». Tiens ! Un homme, en nage à la fin de ce repas, le visage devenu tout rouge comme le piment, l’épice principale de la soupe de poisson, finit par entrer dans l’eau. Il se baigne, torse nu. D’autres n’ayant pu vaincre leur pudeur portent sur lui un regard envieux. 


A l’opposé du « eojuk » comme plat estival, il y a le « kongguksu », un plat de nouilles servies dans un bouillon de lait de soja froid. Sa consommation en Corée remonte au moins à l’époque Joseon, à la fin du XIXe siècle plus exactement, date à laquelle est publié un recueil de recettes mentionnant ce plat très rafraichissant en été.


On ne le mangeait cependant pas tous les jours, car sa préparation, en particulier celle du lait de soja, demandait un travail énorme. Un ménage de Joseon était généralement une grande famille composée de plusieurs générations. Afin de satisfaire toutes les bouches, il fallait préparer une grosse quantité de nouilles et surtout de jus de soja qu’on obtenait au moyen d’une meule à grains. Qui faisait ce travail long et fatigant au sein d’une famille ? Eh bien, les femmes, d’autant que tout homme digne de sa position de patriarche devait s’interdire de se mêler aux travaux domestiques.


Imaginez qu’un jour où le soleil darde ses rayons et surchauffe tout le territoire de la dynastie Joseon, l’homme le plus âgé au sein d’une famille insinue son envie de se rafraichir grâce au plat magique contre la chaleur insupportable, à savoir le « kongguksu ». Toutes les femmes sous la direction de la grand-mère se mettent alors au travail, manœuvrant à tour de rôle une meule en pierre. Qui dit « tâche fastidieuse » dit « chant de travail ». En matière de musique folklorique, nombreuses sont effectivement les mélodies portant comme titre « Chant de meule ». 


Liste des mélodies de cette semaine

1. « Saleum » chanté par Chu Da-hye.

2. « C’était un jour nuageux... » chanté par Yi Hee-mun.

3. « Chant de meule » chanté par Ko Sung-ok.

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