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Mouvement et repos

Un extrait des « Entretiens de Confucius » :

L’homme intelligent aime les eaux ; l’homme sage les montagnes. L’homme intelligent se donne du mouvement ; l’homme sage demeure immobile. L’homme intelligent jouit de la vie ; l’homme sage de la longévité.


Liquide ou solide ? Cinétique ou statique ? Dépenser de l’énergie sans se préoccuper tellement de son épuisement ou, au contraire, conserver au mieux cette source vitale pour vivre le plus longtemps possible ? Ce passage d’un grand classique chinois semble nous proposer une alternative dans la vie. Quel était le choix de Confucius ? Eh bien, une vie après l’autre. Ayant acquis sa notoriété, il se rendit, avec ses disciples, dans différentes principautés pour proposer son service, voire dans le but de réaliser son idéal politique. S’étant aperçu que la réalité n’était pas la sœur du rêve, il se retira du monde ou presque, et se consacra à l’éducation, pour assurer sa postérité, pour vivre, d’une certaine manière, le plus longtemps possible, même éternellement... Le grand sage vit effectivement encore de nos jours dans la mémoire, non seulement des Chinois, mais aussi de tous ceux qui le vénèrent comme maître à penser.

 Mais l’intelligence et la sagesse ne sont pas incompatibles. Elles sont même complémentaires. Comment un homme dépourvu d’intelligence peut-il être sage ? Et il ne manque de sagesse qu’à très peu d’hommes intelligents. Qu’aimerait alors un homme à la fois intelligent et sage ? Eh bien, la musique, pas du genre rock and roll ou dance music bien sûr, mais celle qui, nous captivant, fascinant, voire immobilisant par sa beauté, active en même temps notre âme, ce mot entendu au sens étymologique, à savoir comme quelque chose qui anime, autant dire l’énergie. Un « sajo », musique d’improvisation, pour geomungo, intitulé Trouvez-vous que tout cela est abstrait ? Ecoutez ce « sanjo », musique « Jeongjungdong », « mouvement dans la quiétude », est de ce genre.

Il était une fois, dans le royaume de Shilla, un certain Okbogo, un virtuose du geomingo. Il se retira dans le Mont Jiri et y demeura 50 ans pour perfectionner son jeu. C’est, bien sûr, une légende. De toute façon, avec son instrument de musique et son désir de parvenir à la perfection, il s’ennuyait sans doute peu ou pas du tout dans sa vie solitaire. Grâce à la musique, il pouvait savourer une sorte de dialectique du mouvement et du repos.

 Selon une thèse, Okbogo, musicien du VIIIe siècle, aurait été originaire du Goguryeo, royaume conquis par le Shilla et inventeur du geomungo. L’homme n’ayant plus sa patrie se sentait-il mal à l’aise sous la nouvelle bannière ? Etait-ce pour cette raison qu’il a choisi de vivre dans une montagne avec comme seul compagnon, l’instrument de musique emblématique de son pays d’origine ? Le royaume de Shilla en pleine expansion n’était cependant nullement hostile envers les cultures des Etats qu’il a assujettis. Ainsi, le geomungo, tout comme le gayageum, inventé, quant à lui, dans la confédération de Gaya également annexée par le Shilla, figurait parmi les trois instruments à cordes les plus appréciés au sein de ce royaume. Quant au troisième, le bipa, il n’a pas été inventé, lui non plus, dans le Shilla. C’était la forme dérivée du pipa, un instrument de musique chinois de la famille du luth, qui était très populaire à l’époque de la dynastie Tang, une alliée du Shilla dans sa guerre d’unification de la péninsule coréenne. Ce royaume avec comme capitale l’actuel Gyeongju, un haut lieu touristique de la Corée du Sud, était donc culturellement très ouvert. 

Pour parler cette fois des trois instruments à vent qui étaient les plus populaires dans le royaume de Shilla, ils appartiennent tous à la famille de la flûte et sont appelés daegeum, junggeum et sogeum selon leur taille. Le daegeum, le plus grand et le plus joué, comporte un trou supplémentaire par rapport aux deux autres : le « cheonggon », trou de mirliton, recouvert d’une fine membrane de roseau. Quand on en joue, cette membrane vibrante produit un son nasillard, ce qui peut être perçu par certains comme étant désagréable. Quant à ceux qui adorent le daegeum, ils l’apprécient pour ce son saugrenu justement. Celui-ci produit en quelque sorte un effet semblable à celui du scherzo ; ce mot italien signifiant littéralement « plaisanterie ». Au son étrange, choquant même pour certains, produit par le « cheonggon », on peut penser aussi à la musique baroque, à l’origine de cette appellation plus exactement. Le mot « baroque », « barroco » en portugais, désigne des perles de forme irrégulière, quelque chose de très beau avec, hélas, un petit défaut. Mais est-ce qu’on aime seulement quelque chose de pur ? Un trait d’humour dans un discours solennel peut rendre celui-ci encore plus emphatique. Un petit incident survenu dans la vie paisible peut rendre celle-ci encore plus précieuse. La musique comme la vie peut bien tirer profit d’une combinaison harmonieuse des éléments antinomiques, liquide ou solide, cinétique ou statique, pour nous référer à nouveau à un extrait des « Entretiens de Confucius »...


Liste des mélodies de cette semaine

1. « Jeongjungdong » interprété par Geomungo factory.

2. « La chant des oiseaux », sonate pour bipa interprétée par The Ryu.

3. « Sanjo pour daefeum du style Park Jong-ki » par Park hwan-young.

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