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ⓒ CULTURAL HERITAGE ADMINISTRATION

« Un bateau de plaisance devance un autre. Puis, il se laisse doubler par un troisième. L’orchestre à bord joue d’une musique s’inspirant de la prospérité et de la paix. Les geishas invitées sur les bateaux sont toutes marquées par la jeunesse éclatante et ont particulièrement pris soin de leur toilette... » Ainsi note une certaine Song, l’épouse d’un homme de petite noblesse dans le royaume de Joseon, en se souvenant de sa première promenade en bateau qui s’est déroulée sur le fleuve Geum.


 Une promenade fluviale de telle envergure n’était bien sûr pas à la portée de tous les Coréens de l’époque. En fait, même pour Song et les siens, une famille assez riche de Nonsan, une commune à proximité du fleuve Geum, il s’agissait d’une activité de loisir exceptionnelle qui s’est organisée pour fêter un grand événement au sein de leur maison. Le beau-frère de Song, l’aîné de son mari, venait d’être nommé administrateur de Gongju, ville limitrophe de Nonsan. Pour s’en féliciter, voire pour s’en vanter, il a choisi de donner une fête sur l’eau à laquelle tous ses proches ont été invités. Avant même son déroulement, alors que les invités se dirigeaient vers l’embarcadère, cet événement familial a effectivement attiré l’attention de toute la commune. Témoignage de Song : « Les hommes à cheval, les femmes en palanquin, nous avons pris le chemin du Geum. Une foule sur les deux côtés de la route. Je rougissais un peu de leur regard. Mais j’étais aussi fière. » Elle était sans doute fière d’avoir au sein de sa famille un mandataire du roi. Il semble aussi qu’elle s’enorgueillait d’une activité de loisir de luxe à laquelle elle était invitée, une fête visiblement ostentatoire. Les gens du peuple ne pouvaient qu’en rêver. Et comme l’art est souvent la manifestation d’un rêve, il n’est pas étonnant de voir que la promenade en bateau est chantée dans plus d’une chanson folklorique. 


Un tableau cette fois, datant de l’époque du Joseon, représente une fête sur l’eau encore plus somptueuse, encore plus ostentatoire, semble-t-il, car selon son titre, elle a été organisée afin d’honorer l’arrivée d’un nouveau gouverneur de Pyongyang, la ville la plus importante dans le territoire septentrional du royaume, un haut lieu stratégique aussi. Son gouverneur, relativement indépendant du gouvernement de Séoul, appelé Hanyang à l’époque, avait un pouvoir immense. C’est probablement pour être à la hauteur de cette puissance que la fête sur le Daedong, le fleuve baignant la ville, a été organisée de façon si somptueuse. Une dizaine de bateaux, petits et grands, flottent sur le cours d’eau, éclairés de la lumière des lanternes multicolores, car la fête se déroule la nuit tombée.


En regardant ce spectacle exceptionnel et en écoutant de la musique venant des bateaux, que pensent ces gens alignés sur la rive, une torche à la main ? « Ca vaut la peine d’être le gouverneur de Pyongyang », se disent probablement certains des administrés mobilisés pour l’éclairage, ceux qui croient que ce travail bénévole fait partie des devoirs du citoyen. Eh oui, nous sommes à l’époque où les Coréens ne mettent pas encore en cause la société d’ordres.


Un spectacle semblable à cette fête-là : une dizaine de bateaux sont éclairés et animés de chant. On ne les trouve cependant pas sur un cours d’eau, mais sur une mer. Nous sommes au large de l’île de Gueomun, à une quarantaine de kilomètres au sud de la péninsule coréenne. Et nous avons affaire, non pas aux fêtards, mais aux marins qui sont à la pêche aux anchois. En fait, celle-ci se fait traditionnellement la nuit, avec des éclairages pour attirer ces petits poissons particulièrement abondants au large de l’île de Gueomun.


Un moyen supplémentaire pour séduire des anchois qui sont énormément consommés en Corée : les marins pêcheurs frappent le bord de leur bateau avec un bâton. Il n’est pas question qu’ils exécutent ce mouvement de façon à en être victimes, à savoir que le bruit infernal leur casse les oreilles. Ils ont dû se mettre d’accord sur un rythme, une cadence. Voilà la naissance de la mélodie. Quant à ses paroles, ce sont des mots d’encouragement pour ceux qui rament. Il s’agit donc d’un chant de travail de catégorie « Baetnorae ». Attention : il ne s’agit pas de confondre ce terme avec le mot « baetnori » qui, lui, veut dire « promenade en bateau ».


Liste des mélodies de cette semaine

  1. « Promenade en bateau » chanté par Yi Hee-mun. 
  2. « Chants de marins de Gueomundo » par Jung Kyung-yong.
  3. « Baetaragi » chanté par Kim Mu-bin. 

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