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Le danga

Le « danga » est, selon le dictionnaire du gukak, « une chanson relativement courte que le chanteur interprète sur scène pour échauffer sa voix, avant de donner un concert de pansori ». Mais si ce n’est que pour préparer sa voix, pourquoi la chanter devant un public ? Normalement, le chanteur devrait faire cet échauffement vocal avant de monter sur scène, en coulisse. On peut alors se demander si chanter un « danga » ne fait pas partie intégrante du spectacle, s’il ne s’agit pas là pour le chanteur, autant que d’échauffer sa voix, de réchauffer l’ambiance de la salle, voire de préparer le public à un long spectacle qu’est le pansori, qui dure plus de 2 heures pour le plus court.


En fait, un « danga » au niveau de ses paroles est souvent de nature à permettre au chanteur de nouer un contact avec son public, de façon à évoquer une vertu ou une valeur, la loyauté ou la piété filiale par exemple, sur laquelle lui et son auditoire sont censés être d’accord. Dans certains « danga », le chanteur est philosophe et cherche à faire adhérer son public à la thèse qu’il défend. C’est le cas de « Quatre saisons » dans lequel chaque saison est comparée à une phase de la vie. Après cette mise en parallèle, le chanteur philosophe expose sa thèse quelque peu épicurienne : « Jouissons de la vie, d’autant qu’elle est courte. » Selon lui, enfin selon les paroles de son chant, même si l’on vit jusqu’à 80 ans, une longévité qui était plutôt rare dans le passé, la somme du temps dont on peut profiter se réduit considérablement si l’on y soustrait une sorte de temps mort, celui du sommeil par exemple. Mais là, plus d’une personne n’est certainement pas d’accord. Dormir est un plaisir. On ne s’en rend compte que quand on n’arrive plus à dormir comme un ange.


Dans le quotidien, c’est le plus souvent de façon à se présenter qu’on entre en contact avec une personne inconnue. Un « danga » intitulé « Gwandaega » confirmerait ainsi notre hypothèse selon laquelle ce genre de chanson serait chantée afin d’établir un contact entre le chanteur et son public.


Dans cette chanson écrite par un certain Shin Jae-hyo à la fin du XIXème siècle, le chanteur ne dit bien sûr pas qui il est, mais qui est le chanteur de pansori, à savoir ce à quoi il s’emploie. Ses explications sont assez flatteuses pour le public, car il dit que son métier ne consiste qu’à distraire les gens. Autrement dit, il ne se considère pas comme un artiste au sens noble du terme, mais comme un « gwangdae », « clown » ou « bouffon » en français. Le « gwangdae » a toutefois ceci de différent du bouffon : il amuse, non pas la cour des nobles, mais les gens du peuple auxquels il appartient. Voilà une affirmation qui le rend sympathique aux yeux des spectateurs essentiellement de souche modeste. Le chanteur et le public viennent de se lier d’une connivence. En fait, quoiqu’il fût apprécié aussi par les aristocrates, le pansori était un art du peuple. A noter que « pan » veut dire « lieu public », la place publique ou le marché dans les villages. Quant au « sori », « bruit », c’est le terme péjoratif qualifiant la parole d’une personne qui, dans une société hiérarchisée, n’avait pas doit au respect, la parole du peuple en l’occurrence à laquelle la classe dirigeante ne prêtait pas l’oreille ou presque.


Histoire de sympathiser avec le public de souche modeste aussi, un « danga » fait l’éloge de la vie simple. Il s’agit de « Jukjangmanghye », titre constitué des noms des deux objets évoqués dans les paroles. Les spectateurs peuvent trouver ce texte d’autant plus sympathique qu’il parle d’un noble qui, pour faire une randonnée au printemps, a opté pour un équipement le plus sobre possible. Il a préféré partir sans son poney, ni son valet, avec pour tout accessoire un « jukjang », une canne en bambou, et un « pyojubak », une calebasse, un récipient rudimentaire, léger à porter sur soi et très pratique quand le voyageur tombe sur une source d’eau. Un petit luxe qu’il s’est tout de même permis : il est chaussé de « manghae », une paire de chaussures que l’on est tenté d’appeler les « sneakers de Joseon », car elles sont très appréciées par les dandys de l’époque pour le confort et aussi pour le style.


Liste des mélodies de cette semaine

  1. « Quatre saisons » chanté par Cho Sang-hyun.
  2. « Gwandaega » chanté par Park Dong-jin.
  3. « Jukjangmanghye » chanté par Park Gyu-hee.

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