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Le geomungo hier et aujourd’hui

La constellation geomungo, c’est le nom coréen de la Lyre qui, selon la mythologie grecque, aurait été créée par le dieu Apollon. La légende est bien connue : le dieu des arts a offert sa lyre au musicien Orphée. A la mort de celui-ci, il lui a rendu hommage en transformant cet instrument en constellation.


Il ne s’agit pas de penser que dans ce groupe d’étoiles, les Coréens voyaient comme les Grecs anciens un instrument à cordes. Ils ont tout simplement traduit le nom occidental de cette constellation de façon à prendre la lyre pour l’équivalent d’un instrument de musique traditionnel de leur pays, le geomungo.

 

Mais pourquoi le geomungo et non le gayageum par exemple, un autre instrument de musique coréen à cordes, presque aussi vieux que le geomungo ? Ils ont par ailleurs une forme presque identique. Est-ce parce qu’au niveau de la sonorité, le geomungo ressemblait à la lyre plus que le gayageum ? Mais il est peu probable que le traducteur ait entendu le son de cet instrument de musique occidental antique. On ignore la date précise de la traduction. Mais ce devait être probablement quand le geomungo occupait la première place parmi différents instruments de musique coréens à cordes, c’est-à-dire avant qu’il ne soit détrôné par le gayageum.


Constellation geomungo, « geomungo jari », c’est aussi le nom de scène de l’instrumentaliste Kim Eun-sun, une musicienne jouant bien sûr du geomungo. Elle a composé plusieurs sonates pour son instrument. L’une d’entre elles s’intitule justement « Constellation geomungo ». La musicienne songeait-elle au temps où cet instrument de musique jouissait de la gloire absolue ?


Le geomingo, l’instrument des sages. En effet, les lettrés de Joseon par exemple, ceux qui s’appliquaient quotidiennement à cultiver la sagesse, auraient trouvé cet instrument de musique plus précieux que le « manpasikheok », une flûte légendaire dont le nom veut dire littéralement « calmer dix mille vagues ». Selon la légende, il suffisait d’en jouer pour repousser une invasion ou pour mettre fin à une épidémie. « Mais à quoi bon la paix dans le monde, auraient répliqué ces disciples de Confucius, si l’on ne parvenait pas à calmer les tumultes dans son cœur ? » Ils jouaient justement du geomungo pour trouver la paix dans l’âme.


« Un Sage ne se sépare pas de son qing sans bonne raison », dit « Le Classique des rites », un canon confucéen. Le « qing » ou « guqing » est un instrument de musique chinois antique, l’ancêtre du geomungo. Un certain Wang Sanak, musicien de la cour royale de Koguryeo, en aurait fait une adaptation de façon à supprimer une de ses sept cordes. Et selon une légende, quand il faisait une première démonstration du jeu devant son roi, une grue noire venait danser sur la mélodie. D’où le nom geomungo, « instrument de musique noir ». Alors que certains contestent cette étymologie pour avancer une hypothèse selon laquelle « geomun » ferait référence à l’ancien nom du royaume Koguryeo, si bien que le geomungo signifierait tout simplement « l’instrument de musique de Koguryeo », notons qu’on utilisait souvent cette métaphore pour qualifier un lettré : « Elégant comme une grue ».


Une sonate pour Geomungo, « Black Bird », n’aurait certainement pas été au goût des lettrés de Joseon. Loin de là. Ils auraient été stupéfaits, scandalisés même, face à une pareille pièce de musique servie par « l’instrument des sages ». Alors que cette sonate est justement une création du XXIe où encore peu de monde cherche à cultiver la sagesse, ces honorables lettrés ont réagi de la même façon face à l’apparition d’un nouveau genre musical à la fin du XIXe siècle : le sanjo, musique improvisée ou le « jazz coréen » si vous voulez. Ils étaient d’autant plus scandalisés que ce genre de musique, « barbare » à leurs yeux, inventé par un virtuose du gayageum, Kim Chang-jo, a fini par être servi par bien d’autres instruments dont le geomungo.


Tant pis pour ceux qui s’attachent à la tradition. Les pièces de musique avant-gardistes pour geomungo se multiplient. Le groupe Geomungo Factory, auteur de « Black bird », est parmi les plus actifs en la matière. Certaines de leurs créations sont marquées par une innovation dans la façon de jouer. Le geomungo ne se joue plus par pincement des cordes à l’aide d’une baguette, le « suldae », mais parfois avec les doigts comme le gayageum ou par frottement avec un archet, celui du ajaeng.


Quant à Park Mu-jae, une de ses créations, « La Voix et le geomungo », est aussi avant-gardiste que « Le Labyrinthe », une œuvre de Hwang Byeong-ki, un virtuose du gayageum. Faut-il y voir une vieille rivalité entre les deux instruments ?


Liste des mélodies de cette semaine

  1. « Constellation geomungo » joué par Kim Eun-sun.
  2. « Black Bird » joué par Geomungo Factory.
  3. « La Voix et le geomungo » par Park Mu-jae.

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