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Le « sijo »

Le « sijo », un genre poétique développé durant la période de Joseon, soit du XIVe au XIXe siècle, fait partie intégrante du patrimoine culturel de la Corée. Innombrables sont les poèmes de ce genre qui nous sont parvenus. Tous les Coréens devraient savoir en réciter un, d’autant qu’on apprend à l’école les plus belles illustrations de cette forme poétique. En voici un exemple, enseignée aussi pour sa moralité :


 Le Mont Tai si haut est toutefois au-dessous du ciel

Son point culminant n’est inaccessible

Que pour ceux qui ne tentent pas l’ascension


Les écoliers apprennent ce genre de poème en classe de coréen, alors que selon certains professionnels du gukak, l’enseignement du « sijo » devrait être programmé en classe de musique.


En fait, on aurait tort de croire que le « si » du mot « sijo » désigne la « poésie ». Il s’agit d’un caractère chinois homophone qui signifie le « temps ». Quant au « jo », cela veut dire « accord » ou « harmonie ». Rappelons que la musique est un art du temps consistant notamment à accorder ou harmoniser la durée d’un son avec celle d’un autre. Le « sijo » est, certes, une œuvre poétique, mais un poème destiné à être chanté. La versification a pour but essentiel de donner de la musicalité au texte.


Au clair de la lune, le bateau sillonne une rivière automnale

 Le ciel est plongé dans l’eau avec la belle lune

 Batelier, repêche la Belle pour m’accompagner à boire


Ainsi chante un « sijo », une œuvre anonyme que l’on peut attribuer à un mondain de Joseon, voire un noble oisif ayant loué un bateau pour une promenade fluviale.


Alors que le « sijo » est un tercet avec un nombre de syllabes fixe pour chaque vers, dès la seconde moitié de la période de Joseon, apparaissent des variantes relativement libérées de cette contrainte métrique. Le terme qui les désigne, « saseol sijo », peut se traduire en « poésie narrative ». Il s’agit toujours d’un poème de trois vers, mais avec un plus grand nombre de syllabes dans chaque vers. Souvent considéré comme l’œuvre des roturiers et transmis oralement, le « saseol sijo » est assez prosaïque. En voici un exemple :


 Devenir une grue et avec ma bien-aimée sur le dos

 Voler mille lieues pour se poser là où elle ne me sera pas arrachée

 Et s’envoler à nouveau avec elle si le lieu n’est plus sûr


Ce « saseol sijo », manquant d’élégance pour être une véritable œuvre poétique, est dépourvu aussi de musicalité inhérente comparé à un « sijo » classique. Il nous est toutefois parvenu sous forme d’un chant, de façon à être interprété sur la mélodie d’une chanson folklorique.


L’art doit souvent sa créativité à une interrogation sur une pratique traditionnelle. Alors que le « sijo », aussi bien que le « saseol sijo », est somme toute un rendez-vous de la poésie et de la musique, une joueuse de gayageum, Hwang Jin-a, s’est interrogé : Et si l’on reproduisait en musique instrumentale la mélodie d’un « sijo » et récitait sur cette musique un poème moderne ? La musicienne n’avait plus qu’à choisir un tercet de l’époque de Joseon et un poème marqué par la modernité.


Elle a pris son gayageum pour jouer la mélodie d’un « sijo » et a choisi de réciter sur cette musique un vers libre s’inscrivant dans la poésie moderniste, « Ogamdo » ou « A vol de corbeau ». Le titre est un jeu de mot du fait qu’à un trait près, le caractère chinois « jo », « oiseau » est identique à celui qui désigne un corbeau. Voici à quoi ressemble ce poème :


 Treize enfants courent à toute vitesse dans une rue

 Une impasse pour le mieux


La suite est une sorte de refrain : « Le premier enfant dit qu’il a peur / Le deuxième enfant dit qu’il a peur / Le troisième enfant dit qu’il a peur... » Ainsi de suite jusqu’au vers qui dit :


 Ce ne sont que des enfants terrifiés ou terrifiants

 Le premier enfant peut être terrifiant

 Le deuxième enfant peut être terrifiant


Vous imaginez la suite… A quoi pourrait ressembler ce poème insolite ou ésotérique mis en musique ?


Liste des mélodies de cette semaine

1. « Au clair de la lune » chanté par Kim Wol-hwa.

2. « Noraegarak » par Yi Hee-wan.

3. « Au clair de la lune » avec Hwang Jin-a au gayageum et à la voix.

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