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Le « taryeong »

Un lieu incontournable de Séoul pour les touristes, notamment les visiteurs étrangers, un espace immense avec d’innombrables bâtiments de style ancien et de jolis jardins, il s’agit du palais de Gyeongbok, la résidence des rois de Joseon. En vous y promenant et avec un peu d’imagination, vous pouvez faire un voyage dans le temps.


Geunjeongjeon, la salle du trône, c’est donc là où, vers le XVe siècle, un certain Yi Do se fit couronner au détriment de son aîné. On assistait à l’avènement de Sejong le grand, le roi le plus sage de Joseon, le monarque le plus aimé du peuple aussi.


Jiphyeonjeon, un bâtiment plutôt humble derrière la salle du trône, c’est le berceau du « hangeul », l’alphabet coréen. Sejong devait le fréquenter, car cette écriture facile à apprendre, un beau cadeau pour le peuple illettré pour la plupart, fut inventé à son initiative.


Vous parcourez donc une allée entre ces deux immeubles et passez par une petite porte. « Ah ! » Vous exclamez-vous face à Gyeonghoeru, un immense pavillon érigé au milieu d’une pièce d’eau. Imaginez des festins somptueux qui s’y multipliaient durant la période de la dynastie Joseon, la réception des ambassadeurs chinois par exemple. Quand on songe qu’au XXe siècle, un général putschiste y a fêté avec ses compagnons le coup de force réussi.


S’agissant d’une mélodie avec comme motif ce palais, « Chant du Gyeongbok » ou « Gyeongbokgung taryeong, beaucoup la trouvent tout simplement joyeuse. Légèrement plaintive pour certains dotées d’une sensibilité aigüe. C’est une chanson populaire née au moment de la restauration du palais de Gyeongbok.


Rappelons que cette résidence royale, érigée dès l’avènement de la dynastie Joseon, fut presque entièrement incendiée lors de l’invasion des Japonais à la fin du XVIe siècle. Par les envahisseurs ? Eh bien, non. Par le peuple en rage contre le roi qui l’a abandonné pour s’enfuir vers le nord. Le palais est demeuré en ruine jusqu’au XIXe siècle où le régent Yi Ha-eung, le père du roi Gojong, lança sa restauration afin de rétablir l’autorité royale.


Où trouver une main-d’œuvre quasiment gratuite ? Parmi le peuple bien sûr. Les paysans, qui représentaient la grande majorité de la population de Joseon, n’étaient pas ravis de la mobilisation pour les travaux, et ce d’autant plus que ceux-ci furent lancés à une période cruciale pour eux. Le texte de « Gyeongbokgung taryeong » précise effectivement la date de lancement des travaux : en avril 1865. Et ce mois-ci, les paysans auraient normalement été mobilisés pour une toute autre tâche, vitale pour eux : le repiquage du riz. Si jamais le régent prêtait l’oreille à la mélodie populaire semblant chanter la restauration du palais de Gyeongbok, il pouvait interpréter cette précision de la date comme une preuve que les gens du peuple considéraient le lancement des travaux comme un événement mémorable. Mais en réalité, il s’agissait de laisser entendre une plainte, d’exprimer une vaine colère. Ce à quoi répondait parfaitement bien ce type de mélodie dit « taryeong », semblant être marqué par la sagesse : A quoi bon se plaindre ? Admettons avec joie ce qui est forcé et inévitable pour tromper la peine. Il n’est pas étonnant d’entendre un chant bouddhique relevant du même type de mélodie.


Alors qu’en termes musicaux, le « taryeong » désigne donc un type de cantate assez particulier basé sur une mesure à 12 temps, le même mot, cette fois dans l’usage courant, est employé pour qualifier une action inlassablement répétitive relevant d’une obsession. Un exemple : une mère auprès de son enfant écolier ou collégien ne cesse d’insister sur sa réussite scolaire. L’enfant faisant la moue peut dire : « Maman fait le taryeong d’études. » Sa mère peut riposter : « Et toi, tu fais le taryeong d’argent de poche. »


Imaginez une famille pauvre qui ne mange pas souvent à sa faim. Quel « tareyong » ferait-elle ? Oui, « bap taryeong » ; « bap » en coréen voulant dire le « repas ». Cette famille démunie peut faire un autre « taryeong »  en se plaignant sans cesse du manque d’argent. Elle fait ainsi un « don taryeong ».


C’est le cas du ménage de Heungbu dans un numéro de pansori éponyme comportant effectivement des mélodies relevant du type « taryeong ». Chansons paradoxalement joyeuses. Il s’agit de tromper la faim, voire d’oublier la pénurie.


Liste des mélodies de cette semaine

1. « Chant du Palais de Gyeongbok » chanté par Chae Su-hyun.

2. « Yeongsanhoesang » avec Yi Jae-hwan au geomungo.

3. « Bak taryeong » et « Don taryeong » chantés par Kim So-hee.

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