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Cinéma & dramas

Caméra de Claire et radio de Hong Sang-soo

2018-06-20

Séoul au jour le jour


Isabelle Huppert et Hong Sang-soo font un duo qui est un trio puisqu'il faut compter sur Kim Min-hee, la nouvelle muse du réalisateur futur divorcé. Les voilà à Cannes, au soleil, dans les cafés et sur les plages, cogitant sur l'essence de la photographie, la couleur des chiens et le sentiment entre les hommes et les femmes. Belle affaire ! On y voit trois choses : le système des festivals, le radio-cinéma à la Hong Sang-soo, la misère du réalisme cinématographique post-moderne.


* Le système des festivals

C'est connu : Isabelle Huppert, égérie de films légendaires d'une génération libertaire comme «Les Valseuses » de Bertrand Blier, est une activiste (mais dans quel sens ?) du cinéma français avec son mari, le producteur, Ronald Chammah. Ce qui saute aux yeux avec « La Caméra de Claire », c'est la facilité avec laquelle Huppert place un film dans les sélections du festival de Cannes. La recette est simple : elle, d'abord, puis un réalisateur exotique (ici, Hong Sang-soo) puis quelques longs plans-séquences et dialogues alambiqués, la plage de Cannes et quelques échoppes connues, un sac Chanel, un rain-coat Burberry et un bracelet (disons Dior) et l'affaire est dans le sac. Huppert voudrait-elle dévoiler les dessous des sélections festivalières et par-là même ceux du show-business (parfois encore appelé « cinéma ») qu'elle ne pouvait s'y prendre mieux. Mais rien n'est moins sûr, même si, en voyant ce film, tout porte à y croire.


* Le radio-cinéma de Hong Sang-soo

Non, Hong sang-soo n'a pas redécouvert le théâtre, car au théâtre il y a une scénographie, des effets de lumière, voire une dramaturgie. Le réalisateur sud-coréen a redécouvert les contes radiophoniques de son enfance. Fermez les yeux : vous ne manquerez rien du film. On a eu beau gloser sur Rohmer et Hong - facilité compréhensible - mais le cinéma de Hong, c'est avant tout des dialogues, du texte. C'est un littéraire et – encore une fois – c'est Flaubert – merci du peu – qu'il faudrait citer. Les longs plans de Hong sont le négatif de la vision – il s'en moque éperdument - . Ce n'est même pas une captation du temps qui passe, car les situation sont tellement faites pour porter le texte, que le temps y est scandé par le rythme des répliques. La radio a eu ses heures de gloire, en France mais aussi en Corée du Sud encore aujourd'hui avec ses récits, de temps à autres, réalistes (bruits des vagues, du vent, pet d'un chien qui passe, etc.) mais reste essentiellement fasciné par le texte, les subtiles intonations de voix, le vocabulaire choisis précisément. Personne ne bégaie dans un film de Hong Sang-soo, personne ne dit un mot de trop ou de moins. Le verbe est sacré.


* Misère du réalisme dans la condition postmoderne

Inutile de citer Lyotard pour comprendre que des films qui affichent des effets de réels recyclés effacent encore plus le réel que les fictions lambda et leur système narratif artificiel. Par exemple, personne ne demande à Isabelle Huppert son âge dans le film, surtout pas les sud-Coréens : le réalisateur (Jung Jin-young, double rêvé de Hong), la productrice (excellente Chang Mi-hee) et l'employée de la même productrice (Kim Min-hee). Huppert est censée être une enseignante qui aime faire des photos (avec une sac Chanel et un bracelet Dior). Au pays du Matin clair, c'est connu, demander l'âge de la personne à qui on parle est une routine, voire une forme de politesse. Par ailleurs, notre réalisateur de « fiction », sélectionné à Cannes, est bien trop esseulé dans son resto chinois pour qu'on y croit. Certes, il y a des allusions à la vie réelle de Hong Sang-soo : Kim Min-hee est vraiment sa maîtresse ; la productrice avec qui le réalisateur du film couche et qui est « jalouse » de son employée (alias Kim Min-hee) pourrait bien représenter son épouse réelle. La belle affaire ! Il préfère la jeune, mais finalement retourne avec la vieille. Et non, cela ne s'est finalement pas passé comme ça. Bref, tout cela n'a rien de bien réel en dehors des contes et légendes de la vie des gens du show-business. C'est dur la vie d'artiste médiatique. Comme on les plaints, les pauvres !

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