Aller au menu Aller à la page
Go Top

Cinéma & dramas

« Moonlit Winter » et COVID-19

2020-04-29

Séoul au jour le jour


Pandémie oblige, les salles se vident et les sorties de blockbusters sont reportées en Corée du Sud. Pour combler les vides, voilà que le psycho-drame « Moonlit Winter » de Lim Dae-hyung ressort au milieu des films hollywoodiens « virus friendly » bien connus, et après une série de films d'horreur et de comédies bon marché. Sans sombrer dans le complotisme, on peut se demander pourquoi ?


* L'hiver et la lumière de la lune

Non, « Moonlit Winter » n'est pas une étude sur la face cachée de la lune, notre astre moribond préféré. Le film est une production liée à l'Asian Cinema Fund Support ou ACF, qui monopolise de nombreuses sélections en festival. D'ailleurs « Moonlit Winter » a fait la célèbre clôture du Festival de Busan en 2019. L'histoire raconte comment une jeune fille, vivant avec sa mère divorcée, découvre une lettre adressée à sa mère venue de l’étranger. Elle organise alors un voyage au Japon pendant un hiver neigeux. Là, un très mystérieux et redoutable secret venu du passé de la mère les attendent.


* Mère-fille

Ce qui intéresse notre jeune réalisateur est avant tout la relation mère-fille. Nous sommes au moment de l'internationalisation du mouvement « metoo » et il y a bien un côté « féministe » bon-enfant qui réapparaît alors dans le cinéma sud-coréen. Déjà, quelques films ont tenté d'évoquer l'homosexualité (l’excellent « No Regret » de Lee-Song Hee-il en 2005, par exemple), le lesbianisme (le non moins excellent « Mademoiselle » de Park Chan-wook en 2016), mais en filigrane ; car tout cela est encore très contesté par les pouvoirs religieux et traditionalistes. Mais l'époque est aussi à l'anti-japonisme, surtout depuis que l'archipel nippon est tombé sous le joug de gouvernements conservateurs et révisionnistes crypto-fascistes. Et le voyage au Japon du film est, en plus d'un voyage hors de l'hétéro-centrisme, un voyage vers l'internationalisme et hors du sacro-saint ethnocentrisme.


* Le froid de l'hiver

Il est clair que malgré ses chaleureuses intentions, le film reste congelé par les neiges de Sapporo. Cela explique le lourd symbolisme du film, les ellipses plus ou moins intentionnelles. On a l'impression que le réalisateur n'était pas certain que ses spectateurs captent l'histoire, un peu comme dans les feuilletons télévisés où on répète dix fois la même chose. On sent que les producteurs voulaient cibler des spectatrices avec une esthétique et une histoire qui prétend parler d'elles et de leur sensibilité. Cependant, le rapprochement entre homosexualité et les générations multi-ethniques (coréano-nippons, dans ce cas) est assez étrange. Lim Dae-hyung

parle dans ses interviews de son intérêt pour les minorités, certes, mais on y voit une ambiguïté, comme une sorte de criminalisation en creux : les homosexuels seraient des déviants, tout comme les multi-ethniques. Le couplage étrange et malvenu de ces deux cas sociaux provoque une double lecture possible du film selon les spectateurs : ceux réellement ouverts aux dites « minorités », et ceux adeptes de l’ethnocentrisme et de l'hétéro-centrisme. Dans les deux cas, le film ne changera rien, et c'est peut-être là sa misère.


Néanmoins, avec toute cette neige et ce froid sur les images, on comprend les programmateurs qui ont pensé que cela pourrait calmer symboliquement les fièvres de spectateurs présentant les premiers symptômes du nouveau coronavirus.

Contenus recommandés

Close

Notre site utilise des cookies et d'autres techniques pour offrir une meilleure qualité de services. En continuant à visiter le site, vous acceptez l'usage de ces techniques et notre politique. Voir en détail >