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Cinéma & dramas

New World et apologie du gangstérisme

2020-06-10

Séoul au jour le jour


Le film « New World » sorti en 2013 avec à l'affiche Choi Min-shik, Lee Jung-jae et Hwang Jung-min surfait sur la nouvelle vague de films de gangsters relookés bon-chic-bon-genre l'année précédente dans « Nameless Gangster : Rules of the Time ». Cheval de bataille de « Well Go USA », la société de diffusion de films sud-coréens aux Etats-Unis, le film ne fut pourtant qu'une étape pour le réalisateur Park Hoon-jung qui devait réaliser son meilleur en 2017, le sulfureux : « V.I.P ».


* Le parrain sans parrainage

L'intrigue de « New World » est simple et compliquée à la fois. Le grand boss de la Goldmoon, une organisation criminelle d'importance, est retrouvé mort. Deux de ses lieutenants se retrouvent à la tête du groupe maffieux. Les flics trouvent que l'occasion est superbe ; l'une de leur taupe joué par Lee Jung-jae, est depuis longtemps en sous-marin dans l'organisation. Sous le contrôle de son chef joué par Choi Min-shik, il est en position de s'emparer de l'organisation. Mais il se trouve déchiré entre son rôle de flic et celui de gangster un peu trop fidèle aux règles du clan maffieux.


*Le choix du gangstérisme

Le clou du film « New World » - et qui rend son titre ironique- est dans la fausse surprise finale : le flic sous couverture s'est depuis longtemps habitué aux valeurs du clan. Cela lui plaît bien de flinguer à tour de bras et de se jouer de la police. Il va décider d'effacer son identité de flic – en liquidant ses anciens chefs - pour devenir un leader du gangstérisme local. Donc, il faut comprendre que le gangstérisme, la maffia a ses bons côtés. La loi, la police et les règles de la société sont à revoir, voire à supprimer si ce n'était qu'elles permettent, justement, aux organisations maffieuses d'exister et de proliférer. Ce dilemme est tout l'enjeu de ce genre de film dont l’ambiguïté date au moins du Parrain hollywoodien des années 1970 mais ne l'était pas tant que ça dans les grandes heures du film noir des années 1930 avec « Scarface », par exemple.


*Un genre en évolution

L'apologie du crime organisé au cinéma ne date pas d'hier. Il est pourtant relativement nouveau dans le cinéma sud-coréen, comme l'indique ironiquement le titre du film. Le film noir à la « Scarface » faisait des gangsters des héros de l'anti-société, une société capitaliste américaine des années 1930 alors complètement tombée dans la misère. Avec le « Parrain » sous influence italienne, on redore le blason des chefs maffieux sous prétexte de transition générationnelle et inter-culturelle. Nous sommes en 1973, l'idée de société alternative a fait des petits, et la maffia, n'en est, après tout, qu'un exemple. Le cinéma sud-coréen ne peut pas vraiment suivre cette tendance à l'époque, car la censure veille au grain. Le thriller, le film noir, n'apparaissent vraiment que dans les années 1990. Auparavant, les mélo insèrent quelques séquences issues des standards des films de gangsters mais cela reste limité : pas question de montrer la police sous un mauvais jour, ni de faire mousser un chef maffieux ou un politicien corrompu. Avec la chute de la dictature, c'est la pression des films venus de Hong Kong à la fin des années 1980, les John Woo et les Ringo Lam, qui vont changer la mise. 


C'est, bizarrement, Im Kwon-taek qui s'y colle avec la série « General's Son » au début des années 1990. Les nouveaux films sur les jeunes fusionnent aussi avec le film de gangster comme dans « Kill the Love » ou « Beat» ou l'érotico-thriller « Underground ». Même Lee Chang-dong mettra les gangsters à la sauce réaliste dans « Green Fish » en 1997. Le top de l'hommage aux films noirs de Hong Kong sera atteint par Kim Jee-woon dans « A Bittersweet life » en 2005. Mais la coréanisation du genre va se faire dans deux sens : avec « The Chaser » et « I Saw the Devil », on vire à l'horreur et au psycho-killer ; avec « Nameless Gangster » puis « New World » et « Gangnam Blues », on est dans la gestion de groupe, dans la métaphore sociétale, dans le bon-chic-bon-genre du gangster comme métaphore de l'employé de bureau et la maffia comme celle de l'entreprise.


*Le réalisateur

Enfin, notons, la présence de Park Hoon-jung à la réalisation. Ce dernier avait participé aux scénarios de « I Saw the Devil » et de « The Unjust ». Après un film encostumé « The Showdown », il revenait là à son genre de prédilection. Mais son parcours reste étrange – mais fidèle à la star Choi Min-shik – quand il tourne ensuite « The Tiger » et sa fable en bois. En 2017, il est consacré grâce à « V.I.P », thriller horrifique entre la Corée du Nord et le Sud qui sera passé sous le boisseau au niveau de sa diffusion officielle mais qui deviendra, peu à peu, un film culte, représentant du film noir à la sud-coréenne. Toujours aussi étrange dans son parcours, Park réalise ensuite un film pour teenagers américains « The Witch Part 1 », probablement poussé par ses nouveaux producteurs de la Warner Bros.

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