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Cinéma & dramas

Project Wolf ou le grand nawak

2022-10-12

Séoul au jour le jour


Le cinéma coréen est connu pour ses films d'action ultra violents, du moins, dans l'esprit. Voilà un nouvel échantillon presque parodique du genre avec « Project Wolf : Hunting » de Kim Hong-sun ; un réalisateur qui s'était fait remarquer avec le film « Traffickers » en 2012. Mais le public retiendra surtout l'acteur chanteur K-pop Seo In-Guk, dans un rôle de méchant, qui fait ici son grand retour dans le film d'action après s'être cassé la cheville à l'armée en 2017.


 

* Squid Game dans un bateau ?

Certes, on pourra jouer de la métaphore avec la situation de base du film « Project Wolf : Hunting ». Suite à l'attaque d'un aéroport, un cargo affrété pour l'occasion doit transporter des criminels en tous genres de Manille vers le tranquille port de Busan. Mais vogue le navire et il se retrouve dans la tourmente. Une tentative d'évasion sème la terreur et le chaos dans le cargo. Tout y est désormais permis. Les jeux commencent où ils sont déjà faits, si l'on métaphorise cette mer démontée qui ne laisse aucun espoir à ceux qui voudraient s'évader. Défile alors une série de portraits comme celui de l'héritier d'un gang mafieux interprété par Seo In-guk. On a ensuite l'excellent Sung Dong-il en tête brûlée et capitaine des gardes côtes. Les autres personnages passent relativement vite – ils se font vite tuer – mais on peut noter la volonté du réalisateur de leur donner une apparence, un minimum reconnaissable afin d'éviter la copie d'un jeu vidéo de massacre.



* Le jusqu’au-boutisme

On reconnaît assez vite que le plan suivi par le réalisateur est celui d'un jusqu’au-boutisme à l'ancienne, c'est-à-dire comme dans les films de Hong Kong des années 1980 avec leurs fins interminables et leur manière proche des arts-martiaux de rebondir à partir d'un petit élément, un détail du décor ou de la situation. On retrouve donc cette dynamique ici, poussée à l'extrême jusqu'à l'absurde. La prise d'un cargo en haute mer se change en massacre après l'apparition du personnage de Choi Gwy-hwa. Le sang coule à flot, mieux : ce sont de vrais geysers qui giclent des carotides comme au temps où Akira Kurosawa faisait des films de samouraïs. On approche le style gore, par moment, avec cette volonté de montrer le viscéral. On peut imaginer que le réalisateur tentait de rivaliser avec le récent chef d’œuvre taïwanais du genre « The Sadness » de Rob Jabbaz : projet de loup s'il en est, mais projet difficile. La qualité de « Sadness » venait surtout de la surprise, de l'incroyable violence gore avec laquelle les zombies s'activaient à l'écran mais aussi d'une certaine conscience donnée à ce nouveau genre de zombies, et à l’absence de héros. Dans « Project Wolf », de zombies que nenni, mais on sait d'avance que tout ce beau monde va s'affronter, ce qui réduit l'effet de surprise. Bien sûr, le réalisateur en a été conscient et a introduit un dernier personnage mortellissime comme un joker dans un jeu vidéo de massacre.



* Slasher quand tu nous tiens

On pourra longtemps gloser sur l'influence des jeux vidéos sur le cinéma d'action. Ici, on devine rapidement que les répétitions dans les combats et les meurtres s'inspirent des jeux. Il y a une thérapie à toutes sortes de psychoses dans les jeux de massacres ; et la répétition quasiment infinie en est fascinante. Elle souligne une incomplétude, une action dont la réalisation n'est pas pleinement satisfaisante ; elle est l'image de l'insatisfaction pure et celle de la recherche d'un refuge. Quand les criminels du cargo s’entre-tuent, on en voit pas la fin, car il n'y a pas de fin ou celle-ci n'est pas du domaine de l'humainement compréhensible. Pour revenir aux effets spéciaux, ceux du film jouent à l'ancienne aussi, en laissant de côté les effets dessinés sur ordinateurs, un retour un peu du côté de Lucio Fulci et de ses peluches ou d'Andrej Zulawski dans « Possession » avec son monstre en forme de vieux préservatif. On pourra reprocher au film de ne pas créer de personnages hors de leurs customisations. Le jeu était peut-être de ne pouvoir s'attacher à un quelconque héros ou à un quelconque méchant, et de laisser la possibilité de les éliminer sans avoir à respecter la sacro-sainte évolution dans les affrontements des plus faibles aux plus forts. C'était peut-être cela. L'apparition des super-soldats est soit une fuite en avant devant un film sans queue ni tête, soit un pied de nez au bon goût assisté d'un public depuis longtemps sous tranquillisants. On imagine que l'avenir d'un tel film sera celui du détournement de quelques unes de ses séquences à des fins plus claires, sans doutes.

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