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Entre joie et tristesse

Un poème du genre « sijo », forme poétique en 3 vers qui s’est développée lors de la période Joseon, chante la joie d’un homme dont la patience est récompensée d’une belle manière.

Premier vers : c’est sans doute un homme qui sait apprécier les petits plaisirs de la vie. Il a planté des chrysanthèmes dans son jardin et a déposé en dessous des pots contenant de l’alcool de riz. Il attend la floraison et la fermentation.


Deuxième vers : les chrysanthèmes fleurissent en même temps que l’alcool devient bon à boire. Notre homme est d’autant plus comblé qu’un ami lui rend visite et que la pleine lune est au rendez-vous.

Le dernier vers est un cri de joie : « Apporte-moi le geomungo. Nous allons nous amuser toute la nuit ».


On imagine deux amis trinquant au clair de la lune, dans un jardin embaumé du parfum des chrysanthèmes. Leur discussion interminable n’est interrompue que par le jeu du geomungo. C’est un moment exceptionnel où tous les plaisirs sensoriels sont réunis. Que c’est beau le chrysanthème à la lueur de la pleine lune ! Il émane un parfum presque enivrant. Et si l’on faisait flotter ses pétales sur l’alcool ? En effet, cela rend la boisson encore plus délicieuse. Et enfin, que c’est agréable cette musique jouée au geomungo, qui semble rendre le silence entre deux notes encore plus profond ! Et le toucher ? Eh bien, la chaleur humaine, car les deux convives sont de vieux amis. 


Les Coréens sont-ils fêtards ? En effet, tous les événements, pour peu qu’ils soient exceptionnels, sont à arroser pour eux. L’homme dans le tercet cité, probablement son auteur, a pu écrire à son ami, s’il ne lui a pas rendu visite à temps : « Mes chrysanthèmes sont en floraison. Cela s’arrose. Tu viens prendre un verre avec moi dans mon jardin ? »


Ce tercet ou « sijo » est repris dans un chant folklorique. Et les paroles, qui le suivent, semblent expliquer pourquoi les Coréens aiment tant les fêtes :


Un rêve, tout n’est qu’un rêve

Toi et moi, nous ne sommes que dans un rêve

Ceci et cela, ce n’est rien qu’un rêve

On s’éveille d’un rêve pour en faire un autre

On nait dans un rêve, on vit et meurt dans un rêve


Selon les paroles de cette chanson, le monde n’est donc qu’une illusion. A quoi bon alors chercher à donner un sens à la vie qui est, elle aussi, une illusion ? Il suffit de nous amuser, et ce sans entrave comme nous le faisons dans un rêve.


Pour des raisons mystérieuses qui attendent d’être élucidées par des spécialistes, les Coréens semblent partager, à quelque degré près, cette conception du monde et de la vie, du moins d’après ce que nous laisse présumer un grand nombre de chansons folkloriques de leur pays. Est-ce par hasard si le bouddhisme comptait, pendant plus de mille ans, les plus fervents adeptes et demeure toujours une des religions les plus pratiquées en Corée ?


Le chant en question est intitulé « Heungtaryeon », « hymne à la joie ». Mais sa mélodie n’est pas si joyeuse. En fait, ce n’est pas seulement le cas de cette chanson. Beaucoup d’autres vieux chants coréens sont plutôt mélancoliques, alors que les paroles chantent un moment heureux, un événement joyeux ou incitent à jouir de la vie. « Qu’est-ce qui nous empêche de nous amuser ? » Ainsi entonne l’interprète de « Changbutareyon », et sur une mélodie plutôt désolante. Il est vrai que ce chant était à son origine celui de commémoration d’un musicien mort noyé à un âge encore jeune. Le texte a donc été écrit à la fois sur le souvenir d’un événement tragique et sur une leçon tirée de cet événement, à savoir qu’il faut profiter de la vie. N’empêche que l’on a l’impression que ce chant ainsi que bien d’autres faisant l’éloge de la vie, mais sur une mélodie désolante, traduit une sorte de tempérament des Coréens : que tout a une fin, cela leur revient sans cesse à l’esprit, même au moment où ils vivent un événement joyeux, pour finir par murmurer : « Tout est éphémère comme un rêve. » Ainsi, une joie, qui les emporte, est à tout moment susceptible de se transformer en désolation, comme on s’éveille d’un beau rêve pour constater la réalité qui n’est pas à la hauteur de celui-là. 


Liste des mélodies de cette semaine

  1. « Planter des chrysanthèmes » chanté par Kim Yong-woo.
  2. « Heungtaryeong » chanté par Kim Su-yeon. 
  3. « Une rivière automnale » chanté par Choi Un-young.

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