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Cinéma & dramas

Night in Paradise : mais que fait la police ?

2021-05-05

Séoul au jour le jour


Le film de gangsters couillus « Night in Paradise » signé Park Hoon-jung tente de renouer avec la tradition du cinéma tragique et sanglant de John Woo à Kim Jee-woon dans ses meilleurs moments en passant par De Palma et Kitano. Et, surprise, il y parvient par moment. L'île paradisiaque de Jeju, où se situe une grand part du film, n'a pas fini de nous surprendre.


* Un scénario de noir de chez noir

Il est souvent difficile de connaître les véritables scénaristes des films produits par les monopoles ; ici il s'agit de Next Entertainment. Officiellement, le réalisateur lui-même s'est acoquiné à « l'adaptatrice » Shin Soo-jeong. Quoiqu'il en soit, le scénario a du « blues » à retordre : un loup solitaire désabusé qui perd sa sœur et sa nièce dans un accident dès les premières minutes, une nièce de gangster qui est suicidaire sur les bords, des gangs rivaux qui se tirent la bourre pour le pouvoir et une mission qui sent bon le dernier baroud d'honneur. Avec ce schéma glauque mais efficace, on est proche du célèbre mais surfait « Samouraï » de Melville (avec de meilleures scènes de bastons) et surtout de l'indépassable «A Better Tomorrow» de John Woo. Il ne manque, à vrai dire, que la femme fatale, mais ce sera pour une autre fois.


* Des moments hauts...

Il est clair que Park Hoon-jung, déjà auteur de films noirs jouissifs comme « I Saw the Devil » (en tant que co-scénariste) et « V.I.P», mais aussi des navrants « Showdown » et « New World », ne s’intéresse qu'aux moments de fusillades et de bastons. On les trouve au début et à la fin du film. Citons une première scène de poignardage dans un sauna avec beaux gosses tatoués à la Kitano. Puis une scène de cascades en voiture à faire pâlir les hollywoodesques « Fast and Furious » qui se termine par un improbable carnage dans une voiture accidentée.


L'acteur Uhm Tae-goo qui interprète le loup solitaire se retrouve engoncé dans la voiture dont les portières sont coincées et affronte à l'arme blanche (voire avec tout ce qu'il trouve) une horde de gangsters mal intentionnés. Le pire est qu'il en réchappe. Mais que fait la police de Jeju où le tueur a été exilé ? Notons au passage une jambe cassée, celle d'un gangster russe, à coup de portière de voiture. Mais le clou vient ensuite : un excellent coup de pied revanchard dans la tête du pauvre tueur ; et ce même tueur, déjà bien amoché, qui est à deux cheveux de tuer son ex-employeur à coups de tête. Une première à ce jour, peut-être, dans le cinéma.


Sur ce, la musique de Mowg, jouée au piano et au violoncelle vient donner un ton mélancolique à tout cela en évitant la redondance habituelle des musiques de film made in monopole.


* Et des moments bas...

Si le début et la fin du film tiennent bon la corde des films noirs violents, le milieu s'enlise dans une romance trop « téléphonée » entre le tueur et la fille suicidaire. Traditionnelles sous intrigues poussives à la manière d'hollywood aggravées, ici, par la tendance locale à la minauderie de pacotille. Le réalisateur lui-même, semble s'en désintéresser. Certes, l'île de Jeju est belle, bucolique avec ses plages désertes balayées par un vent à décorner les bœufs, et serait un parfait contrepoint à la violence des gangsters, certes la musique de chambre mélancolique distancie et incite à la méditation transcendantale, mais cela ne suffit pas à combler d'évidents trous de scénario. Etrangement, la star Cha Seung-won qui joue un chef de gang blasé, ne vient compenser les choses qu'en fin de course.


* Noir comme Netflix

Il faut créditer le film d'un travail sur la couleur qui est probablement lié à sa diffusion sur Netflix, donc à l'international. Les films locaux ayant longtemps bâclé cet aspect. Ici , les bleus et les verts viennent miter les images, comme de la pourriture sur un vieux fromage qui correspond bien au monde (imaginaire) de ces gangsters de cinéma. Dommage que le « color grading » se perdent en cours de route. A propos d'internationalisation du cinéma sud-coréen, le film tient la barre avec une violence qui a fait son succès en Europe et aux Etats-unis. Notons quand même, qu'il s'agit d'imagination car on a plus vu de gangs s'affronter en plein aéroport depuis l'époque des dictateurs où ceux-ci servaient à briser les grèves et à terroriser la population. De même, l'internationalisation se voit dans la profusion des armes – le film est une vraie pub pour les célèbres semi-automatiques Tokarev russes.


Reste un film inégal en dessous du meilleur noir sud-coréen de ces dernières années « Asura » de Kim Sung-su, mais meilleur que la plupart des films de gangsters locaux qui, souvent, ne sont que des prétextes pour faire reluire le star-system. Ici, le jeune Uhm Tae-goo et la transparente Jeon Yeo-been restent en retrait pour sauver les meilleurs moments du film.

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