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Cinéma & dramas

« Hunt » signé Lee Jung-jae

2022-09-07

Séoul au jour le jour


Le succès international de la série « Squid Game » a probablement encouragé l'acteur Lee Jang-jae à prendre les manettes d'un film, « Hunt » qu'il a co-écrit. Mieux : le festival de Cannes, jamais à cours d'opportunités, décide de projeter « Hunt » en séance nocturne spéciale. Marketing et glamour sont donc au rendez-vous, mais est-ce que le film lui-même est à la hauteur du sémillant « squid-gamer » ?



* Espions années 80

Lee Jung-jae a des ambitions politiques, c'est clair. Son scénario fait de nombreuses allusions sur la situation tragique des années 1980 en Corée du Sud. Le nouveau dictateur Chun Doo-hwan et ses amis fascistes de Hanahoe ont lancé une campagne de répression de l’opposition politique sans limite. L’insurrection de la commune de Gwangju est écrasée, les arrestations à Busan et Daegu se comptent par milliers, une chape de plomb à l'italienne s'abat sur le pays. La rumeur de l'infiltration d'espions agitateurs nord-coréens sert de justification. La KCIA est sur le qui-vive. Les chefs de service Lee Jung-jae et son compère Jung Woo-sung doivent intercepter un renégat nord-coréen. Mais une étudiante entre en jeu, jouée par Go Youn-jung ainsi que le toujours excellent Heo Sung-tae (camarade issu de « Squid game » comme Lee Jang-jae). Puis encore un soldat nord-coréen, et puis on ne s'y retrouve plus dans les multiples rebondissements dont finalement, on se soucie peu.



* Trop d'action tue l'action ?


Dès sa projection au festival de Cannes, les critiques étaient unanimes pour regretter l'absence de profondeur du film ; une profondeur pourtant appeler par l'époque représentée. Si les agents de la KCIA sont dépeints comme des brutes sanguinaires, ils sont aussi élégants en Gucci et en Prada. De même, les étudiants d'opposition sont peu politisés, du moins on ne creuse que peu leurs raisons. C'est que le film préfère l'action dont la mise en scène est ici confiée à Heo Myeong-Heng, qui est déjà connu pour son travail sur « Train to Busan ». Notons qu'on aura rarement vu des agents de la KCIA des années 1980 tirer en pleine rue avec un fusil-mitrailleur M16 automatique. Cela fait référence sans doute aux standards des films d'action hollywoodiens mais nos agents spéciaux véritables préféraient les voitures noires aux vitres noires, les enlèvements nocturnes et les tortures dans les caves aménagées à cet effet dans la plupart des bâtiments officiels de l'administration coréenne. C'étaient des hommes d'une apparence banale qui s'activaient derrière le rideau, à l'inverse de ce que montre le film. Néanmoins, le scénario de Lee Jung-jae et Cho Seung-hee s'inscrit dans la droite file de relectures des affaires politiques coréennes des années de dictatures. Presque en même temps est sorti le film « Kingmaker » avec l'acteur Sol Kyung-gu incarnant un avatar du président démocrate Kim Dae-jung. Là aussi, il est question de corruption, de manipulations politico-financières, et d'espionnage. Les deux films peinent sur la même pente : celle du réalisme historique. Ils ne peuvent qu'évoquer l'époque comme un décor d'arrière-fond faute de savoir imbriquer le micro politique au niveau des destins individuels au macro-politique au niveau des mouvements de masse.



* Lee Jung-jae vs Jung Woo-sung

Mais il y a une autre intrigue dans « Hunt », au de-là du contexte politique et des fusillades d'espions : c'est celle de la relation entre deux acteurs stars du cinéma coréen que sont Lee Jung-jae et Jung Woo-sung. Ces deux acteurs ont commencé en même temps dans le mouvement du Tayozoku coréen du début des années 1980 ; citons les films « The Young man », « Born To Kill », « Beat » et « City of the Rising Sun » qui marquèrent les débuts des deux représentants de la nouvelle jeunesse rebelle coréenne des années 1990, jeunesse qui apparaissait alors comme jamais sur les écrans. Dans « City of the Rising Sun » de Kim Sung-su, ils annonçaient la couleur, mais pris par les romances (au cinéma et dans la réalité) et les blockbusters des années 2000, il leur a fallu attendre ces dernières années pour revenir à des films plus personnels reflétant leurs débuts : comme « Asura » pour Jung Woo-sung et « Squid Game » pour Lee Jung-Jae. Les deux passent en même temps à la réalisation. Ce qui n'est pas facile quand on voit ce qui est advenu des rares tentatives comme celles de Yu Ji-tae avec « Mai Ritima » et « The Man Only I Can see » et de Ha Jung-woo avant ses problèmes de drogues avec « Fasten your Seatbelt » et « Chronicle of a Blood merchant ». Jung Woo-sung fera peut-être mieux que son compère Lee Jung-jae avec son film à venir « A Man of Reason », en tout cas, on l'espère.

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