La comédie romantique « Love 911 » alias « Bandage » de Jeong Gi-hoon a occupé les écrans coréens pris sous les neiges et les glaces de ce rude hiver. Les héros, pompiers de leur métier, qui éteignaient des incendies sur l'écran faisaient envie aux quelques courageux spectateurs congelés dans les salles glacées des complexes du centre-ville. Notons d'emblée que le 911 du titre anglais est celui des urgences aux Etats-Unis, mais c'est le 119 en Corée du Sud.

* Art pompier

L'histoire de cette nouvelle production de Next Entertainment World, est celle de Kang-il (joué par l'acteur Go Soo) qui, suite à la perte accidentelle de sa femme ne recule devant aucun risque pour sauver ses concitoyens des flammes et des eaux. Son attitude sans peur attire l’attention de la belle doctoresse Mi-soo (jouée par Han Hyo-joo). De manière comique et souvent ridicule, elle tente de se rapprocher de lui. Mais les deux tourtereaux, derrière leur mines joyeuses et leurs physiques avantageux, porte en eux de terribles secrets sur leur passé : il n'a pu sauver son épouse, elle est accusée de faute professionnelle.

*Star system à la coréenne

Cousu de fil blanc et de lances d'incendie, cette oeuvre vise surtout à mettre le feu au star system dominant en Corée du Sud. En effet, l'acteur Go Soo, le héros si terriblement meurtri intérieurement par la mort de sa femme, et au comique involontaire, est surtout une silhouette bodybuildé prisée par les jeunes spectatrices coréennes. Le film n'hésite pas à le mettre en valeur en délaissant une histoire trop décalquée de films hollywoodiens bien connus.

Du côté féminin, Go Soo se voit confronté à une ribambelles de jeunes femmes, demi-actrices, demi-mannequins. En effet, nous retrouvons dans l'ordre : Han Hyo-joo, vedette de plusieurs séries télévisées et aperçue avantageusement dans le succès de l'année dernière « Masquerade ». Joo-ni, qui est elle aussi une vedette de sériée télévisée recyclée en faire-valoir pour film B, et enfin Jin Seo-yeon, fantasme vivant de toute une génération de teenagers coréens, top-model de manwhas et de films d'animation auxquels elle prête sa svelte silhouette et ses traits de femme-enfant, et aussi, accessoirement, actrice de séries.

*La lente transformation des modèles physiques des stars coréennes

« Love 911 », en jouant à plein sur le star system, permet de voir comme ceux et celles qui le compose ont transformé leur physique pour s'adapter aux goûts du jour. Visage « design » et corps profilés, sont désormais essentiels pour atteindre le grand écran et même le petit écran. Le cas de Go Soo est particulièrement intéressant, car il implique l'évolution du corps des acteurs masculins. Rompant avec la tradition de l'homme lambda qui a longtemps prévalu dans le cinéma sud-coréen jusqu'aux années 1990, rompant aussi avec l'esthétique du visage et de la voix, qui a prévalu dans les séries télévisées et aussi dans les films de cinéma jusqu'à récemment, Go Soo met en valeur sa musculature « design », et ceci, au risque de choquer la morale publique.

Cette dernière semble s'en accommoder de plus en plus sur le modèle américain, entraînant aussi les jeunes filles sur la même voie du commerce visuel du corps au service de la publicité. Héros de séries télévisés et de la publicité en vrac, Go Soo n'a pourtant pas réussi à percer sur le grand écran. Cette oeuvre est une nouvelle tentative, modeste et probablement vaine, après l'échec de la superproduction « The front Line » en 2011.