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Pour séduire le jeune public
Ce sont bien des mélodies à base de gukak. Dans certaines, on reconnaît le rythme caractéristique des chants folkloriques coréens ou des éléments musicaux propres au pansori, le récit chanté ou « l’opéra coréen ». Ces créations contemporaines sont toutefois marquées par le souci principal de séduire le jeune public. En effet, en regardant un clip en la matière, les jeunes sud-coréens prétendraient qu’il s’agit d’une musique de « leur » génération, à savoir du style k-pop. C’est le plus souvent une musique de synthèse accompagnée de chorégraphie. Certains groupes évoquent un boys band ou un girls band.

Parmi ces musiciens intéressés à la fois par la tradition musicale de leur pays et par le goût contemporain, le groupe TARL a comme particularité de s’inspirer de l’actualité pour sa création musicale, et ce dès son lancement en 2021. Cette année-là, on s’en souvient, le monde était en pleine crise sanitaire en raison de la COVID-19. Le groupe a fait ses débuts avec une chanson faisant référence, par son titre et aussi par une chorégraphie accompagnant le chant, à une ancienne pratique pour remédier à une épidémie : « aekmaki », une sorte d’exorcisme.

En fait, rappelons que dans l’Antiquité, la propagation d’une maladie contagieuse était attribuée en Asie au démon. Il fallait alors chasser l’esprit maléfique pour sortir de la crise sanitaire. Un expert en la matière, portant un masque plus terrible que la figure démoniaque imaginée, exécutait une danse frénétique en entonnant une formule. Signe particulier du groupe TARL : ses membres ont l’habitude de se produire portant tous un masque, mot qui se dit « tal » en coréen.

MURR est un autre groupe de musiciens qui s’est lancé à la conquête du jeune public avec comme arme le gukak adapté au goût moderne. Son activité musicale est caractérisée par la multiplication des expérimentations. A quoi ressemblerait par exemple une pièce de musique du genre blues jouée au taepyeonpso et au piri, deux instruments à vent coréens ? Cette curiosité a donné naissance à une mélodie portant comme titre « Garibong blues » dans laquelle on découvre une dimension inédite du taepyeongso. Cet aérophone associé d’habitude à la joie et à la gaité peut aussi exprimer une tristesse infinie.

Garibong est le nom d’un quartier de Séoul, un lieu où étaient installés, dans les années 1960-1970, d’innombrables usines de manufacture, la locomotive de la croissance économique fulgurante de la Corée du Sud durant cette période-là. Or, on sait qu’à l’ombre de cette prospérité, il y avait des ouvriers, notamment ceux de Garibong, qui étaient surmenés et mal payés. « Garibong blues » semble être dédié à eux. Rappelons que le blues est un genre musical dérivé des chants de travail.

Quant à SORIFLOWER, c’est un véritable girls band en matière de gukak. Ses cinq membres féminins sont convaincus que dans un concert, le visuel est aussi important que la musique. « Musique à entendre et aussi à voir » selon leurs termes. C’est probablement dans cet esprit que le groupe s’est baptisé SORIFLOWER, « fleur sonnante ».

Les chanteuses sont séduisantes, autant que celles d’un girls band de k-pop. Comme celles-ci, elles exécutent en chantant une chorégraphie calibrée au millimètre. Notons que ce n’est pas seulement au niveau visuel qu’elles cherchent à satisfaire le jeune public. Chanteuses de pansori de formation, elles revisitent le répertoire de cet art vocal pour l’interpréter à leur manière, à savoir de façon qu’il soit mieux accepté ou mieux apprécié par le public de leur génération.

« Topsong » est une illustration parfaite de ces efforts de rapprocher les jeunes sud-coréens de la musique traditionnelle de leur pays. Le titre peut déjà les amuser, d’autant qu’ils adorent les jeux de mots. Cela peut s’entendre pour les anglophones comme « top song », « la meilleure chanson ». En réalité, « top » est un mot coréen qui désigne une scie. Le « son de la scie » alors, à savoir le bruit de scie pour les francophones. En effet, cette chanson, un extrait d’un numéro de pansori revisité, raconte une scène dans laquelle une famille extrêmement pauvre scie une citrouille énorme en songeant qu’elle va bientôt offrir de quoi manger. A l’oreille de ces gens affamés, le bruit de scie s’apparenterait à un son soyeux, voire même à une musique joyeuse. La répétition de l’onomatopée reproduisant ce bruit constitue le prélude de « Topsong »...

Liste des mélodies de la semaine
1. « aekmaki » chanté par TARL.
2. « Garibong blues » chanté par MURR.
3. « Topsong » chanté par SORIFLOWER.

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