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La berceuse
On ne garde aucun souvenir de son premier âge. Un moment de cette période peut toutefois ressusciter grâce à une chanson, celle qu’une vielle dame par exemple murmure au chevet de son petit-fils ou de sa petite-fille : 

Dors mon enfant, dors
Voilà que tu finis par t’endormir
Tu dors comme un ange

Il s’agit d’une berceuse, la plus populaire en Corée. A entendre une chanson de ce genre, on peut se sentir envahi par une euphorie, un sentiment de bien-être parfait jamais connu depuis l’âge adulte. Ce sentiment est tellement doux qu’on éprouve la sensation de s’amollir corps et âme. C’est la résurrection d’un vécu lointain : glisser doucement dans le sommeil, sans aucun souci et sûr d’être sous la protection absolue.

Ce n’est bien sûr pas le texte de la chanson, mais sa mélodie qui ressuscite cette expérience euphorique, un rêve pour les insomniaques. Il ne s’agit cependant pas de penser qu’un adulte se souvient de la mélodie d’une berceuse murmurée à ses oreilles quand il était nourrisson. Il revit en réalité son rythme cardiaque au moment où il était bercé par la chanson.

Alors que la berceuse est une forme musicale destinée à endormir les enfants, son texte quand il s’agit d’une berceuse vocale n’a le plus souvent rien à voir avec cet objectif. En fait un enfant du premier âge n’y comprendrait rien. Les paroles d’une berceuse sont plutôt en faveur de la personne qui la chante. Voici ce que dit la berceuse originaire de la région de Jeolla, de la ville de Gwangyang :

Ouah, ouah, tais-toi
Mon enfant dort
Cocorico, t’es trop matinal
Mon enfant dort encore
Dans sa couche brodée de fleurs
Celui qui aimera ses frères et ses sœurs
Le futur dévoué à ses parents
Le futur sujet loyal envers son roi

Le texte exprime à la fois le souci et le souhait de la personne qui s’occupe de l’enfant. Il n’est pas question pour elle qu’un bruit dérange le sommeil du nourrisson. Elle fait aussi des vœux : que ce petit enfant devienne une personne louable grâce à son amour fraternel, à sa piété filiale et à sa loyauté envers son souverain. Cela revient à dire qu’en souhaitant tout cela, elle est désireuse d’être récompensée pour ses soins.

Peut-on imaginer un père qui chante une berceuse ? Pourquoi pas ? Cela est tout à fait possible quand il s’agit d’un homme qui élève seul son enfant dès son premier âge. C’est le cas du père de Shimcheong, l’héroïne d’un numéro de pansori éponyme.

On plaint ce père monoparental d’autant plus que c’est un non-voyant. A la mort de sa femme suite à un accouchement difficile, il est désespéré. Comment nourrir ce nouveau-né, alors que le lait industriel n’existe pas encore ? Portant son bébé dans ses bras, le pauvre homme se rend vers l’unique puits de son village en espérant trouver une nourrice. Quelle femme capable d’allaiter ne prendrait pas pitié d’un nourrisson ne cessant de pleurer de faim ? « Venez me chercher quand vous voulez », dit une jeune mère. Puis elle ajoute : « Je donnerai le sein d’abord à votre enfant, puis au mien. » Comme elle est gentille !

Le morceau du « Chant de Shimcheong », qui raconte tout cela, est suivi d’une scène dans laquelle le père pleinement satisfait cajole son bébé. Ce faisant, il cherche sans doute à l’endormir. Mais oui, un nourrisson ayant mangé n’a qu’à dormir. On imagine son père qui lui chante une berceuse à sa manière.

Liste des mélodies de la semaine
1. « La Berceuse de Gwangyang » chanté par Kim Duk-nam.
2. « La Berceuse de Jeju » chanté par Gang Deung-ja.
3. Un extrait du « Chant de Shimcheong » chanté par Sung Chan-sun.

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