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Cinéma & dramas

In the Name of the Son : le temps des assassins

2021-05-26

Séoul au jour le jour


Le film « In the Name of the Son » revient sur l'insurrection du Gwangju en mai 1980 et les massacres qui s'en suivirent. Le réalisateur Lee Jeong-guk et l'acteur vétéran Ahn Sung-ki sont de la partie. Ahn est d'ailleurs un habitué des films relatant ces événements. Lee, qui se fait très rare, signe ici un retour en force avec un sujet toujours d'actualité.


* Point de vue des bourreaux

Le dernier film ayant relaté les mouvements démocratiques de cette ville du sud-ouest est « A Taxi Driver » avec la star Song Kang-ho. Gros succès local, le film trouva preneur à l'international malgré une fin peu plausible. Mais comme beaucoup de films sur le même sujet, le point de vue reste du côté des victimes. « A Taxi Driver » tentait pourtant déjà de varier dans sa vision des événements en suivant un chauffeur de taxi qui, au départ, est plutôt neutre voire réticent à soutenir le mouvement démocratique. Un journaliste allemand voulant témoigner des massacres va le convaincre de choisir son camp. 


Avec « In the Name of the Son », un peu comme « Peppermint Candy » de Lee Chang-dong, le réalisateur choisit de suivre les bourreaux, ceux qui étaient derrière les fusils mitrailleurs comme ceux qui étaient aux commandes des opérations. Ahn joue le rôle d'un soldat parachutiste qui a paticipé à la répression sur le terrain en mai 1980 et qui est devenu chauffeur occasionnel. Rongé par le remord, il cherche à laver sa conscience en pensant venger les victimes. Il infiltre donc, grâce à son job de chauffeur de luxe, des gradés en charge à l'époque. Parallèment, il entretient sa promesse de revanche donné à son fils désormais installé aux USA.


* Vengeance ?

Le réalisateur Lee le montre clairement : beaucoup sont les bourreaux de ces jours terribles qui ont vécu depuis une vie tranquille voire bien au chaud de leurs postes de fonctionnaires ou de gradés de l'armée. Pour ceux qui connaissent son œuvre, le propos est plus fort car réitéré: après avoir déjà tourné un premier film novateur sur les massacres avec « The Song of Resurrection » en 1990, il reprend le même acteur, Ahn pour refaire un autre film en 2021. Et cela pour dire que rien n'a changé malgré des films comme « Ô Pays de rêve », «A Petal » de Jang Sun-woo ou « May 18th » avec encore Ahn Sung-ki, jusqu'à « A Taxi Driver ». Peut-être voit-il une solution en étudiant de plus près les bourreaux. C'était déjà un peu le cas dans « Peppermint Candy » où le héros opportuniste était un soldat qui tire « par erreur » sur une adolescente à Gwangju. Le thème de la vengeance était pour la première fois adapté d'un webtoon dans « 24 years ». Un groupe de jeunes y plannifiait l'assassinat vengeur du dictateur de l'époque, Chun Doo-hwan, alors qu'il passe des jours tranquilles dans sa maison de Séoul.


* Histoire à faire

L'histoire du soulèvement et de la commune démocratique de Gwangju reste encore largement à faire. Il faudra problement encore une dizaine d'années avant que les documents essentiels soient accessibles aux historiens. Mais pour eux, il s'agit d'une routine de la profession car, comme en France, par exemple pour les massacres de Sétif en 1945 ou la Ratonnade de Paris en 1961, il a longtemps fallu se contenter de travaux journalistiques avant que les historiens aient accès aux documents plus ou moins secrets, et qu'ils échappent eux-mêmes à des sanctions judiciaires en cherchant à creuser le sujet. Même de nos jours, comme pour le film « May 18th » qui fut baclé faute de budget et blacklisté dès sa préparation par le gouvernement de l'époque, « In the Name of the Son » a eu des difficultés de financement. La région de Gwangju a apporté son soutien financier mais la plupart des acteurs, y compris la star Ahn n'ont pas touché d'argent ou presque faute de budget. Le permier film de Lee « Ressurection's Song », avait été interdit par la censure en 1990. Elle voulait couper 25 minutes du film. Ce dernier est finalement sorti en 1993 avec le nouveau gouvernement de Kim Young-sam avec seulement 5 minutes de coupes. Les temps évoluent donc. Et la pandémie a, dans ce cas, joué un rôle positif. En effet, l'absence des blocbusters des monopoles sur les écrans a permis la sortie de « In the Name of the Son » dans un nombre inespéré de salles. Avec le développement de la mise en ligne des films sur Internet, il sera également disponible sur TV Naver pendant quelques jours. 


* Lee Jeong-guk

Le réalisateur Lee Jeong-guk avait été une révélation au début de l'internationalisation du cinéma sud-coréen. Citons « The Letter » en 1997, puis « Promenade » en 2000 et « Blue » en 2003. Devenu professeur, il n'a repris ses oripeaux de réalisateurs que de temps à autres pour des films indépendants. Citons notamment « Ressurection of the Butterfly » en 2007. A 63 ans, annoncé comme son retour au film commercial, « In the Name of the Son » ne pourra peut-être pas changer la donne, pour lui. Toutefois, son idée de variation des points de vues devraient faire murir de nouveaux films dans l'avenir.

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