Des deux caractères chinois qui composent le nom Myeongdong, un quartier très animé de Séoul, le « dong » signifie la « commune » ou le « quartier ». Sachez que pratiquement tous les noms des quartiers des villes sud-coréennes finissent par « dong », si bien qu’ils sont parfois cités sans cette sorte de suffixe: Yeoido au lieu de Yeoidodong par exemple. Cette abréviation est cependant impossible quand le nom du quartier n'est constitué que de deux syllabes, comme Myeongdong, Jeongdong ou encore Dadong pour ne citer que des quartiers de Séoul.

Quant au deuxième caractère chinois qui compose le nom Myeongdong, « myeong », c'est un idéogramme par excellence. Il est en effet formé par juxtaposition de deux caractères, dont l’un signifie le soleil et l’autre la lune. A l’époque où l’on ne savait pas que la lune était éclairée par le soleil, cet idéogramme faisait référence à la clarté maximale rendue par la lumière de ces deux astres. « Myeong » exprime en effet ce qui est « clair » ou « lumineux ». Le nom Myeongdong signifie donc le « quartier clair ». Il est dérivé de son ancien nom Myeongraebang. On ignore l’origine du nom Myeongraebang, ou plutôt de sa racine Myeongrae, que l’on pourrait traduire littéralement par la « bienséance lumineuse ». Le suffixe « bang », quant à lui, désignait dans le passé le quartier. Quoiqu’il en soit, l'histoire de Myeongdong est liée à la lumière au sens métaphysique, celle de Dieu.



La plupart des Coréens ignorent l’ancien nom de Myeongdong. Les Chrétiens du pays pourtant, notamment les Catholiques, connaissent sans doute la communauté Myeongraebang, la première communauté chrétienne à s’être formée au pays du Matin clair à la fin du 18ème siècle. Des dizaines de fidèles se réunissaient régulièrement pour célébrer la messe chez un certain Kim Beom-woo, un interprète rattaché à la cour royale de Joseon, qui s’est converti au catholicisme et qui habitait justement à Myeongraebang, Myeongdong à l’heure actuelle.

Comme la pratique du catholicisme était interdite en Corée à l’époque, ils célébraient leur messe clandestinement. Or, un policier, qui faisait la ronde dans le quartier, a fini par trouver suspects ces gens qui entraient régulièrement dans la même maison. Il pensa qu'ensemble, ils jouaient de l’argent, ce qui était également interdit dans le pays. Une nuit, en 1785, la maison de Kim Beom-woo fut prise dans une rafle. La police y trouva des bibles et des chapelets et non un tapis et des cartes. Tous les fidèles qui s’y trouvaient ont alors été arrêtés et emmenés à la police. Or, fait surprenant pour les autorités : les enquêtes ont révélé que tous ceux qui avaient été arrêtés étaient issus de la noblesse, sauf Kim Beom-woo, qui, lui, appartenait à la classe moyenne. Il fut le seul, du coup, à subir d'atroces tortures et à être envoyé en exil, alors que les autres furent relâchés pour éviter le scandale. Un an plus tard, Kim mourut des suites de ces tortures. L’église catholique en Corée du Sud le considère comme son premier martyr.

Ce n’est donc pas sans raison qu’en 1898, une fois que le catholicisme a été toléré en Corée, la première cathédrale dans le pays a été construite à Myeongdong, quartier qui s’appelait toujours Myeongraebang à l'époque. Sachez aussi que cette église occupe une place symbolique dans l’histoire contemporaine du pays, notamment dans la démocratisation de la Corée du Sud. Dans les années 1980-1990, les manifestants réclamant plus de démocratie et de justice sociale se rassemblaient souvent autour d'elle ou, face aux forces de l’ordre, se réfugiaient dans cet endroit sacré, même pour les CRS et les autorités politiques. L’église les protégeait donc, un peu comme Dieu porte secours avec sa lumière aux gens perdus dans le noir. Le nom du quartier où se trouve cette église est donc hautement symbolique.



Cela dit, Myeongdong est aujourd’hui un quartier commercial très animé et visité par beaucoup de touristes étrangers. Les vitrines de ses nombreux magasins sont éclairées jour et nuit, comme pour honorer le nom du quartier dans lequel elles se trouvent.