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Pendant une partie de jeu
Certaines pièces de musique gukak sont nées dans des circonstances assez particulières. Il y a par exemple des chansons qui ont été inventées pendant la pratique d’un jeu de société tel que « Tujeonnori ».

« Tujeonnori » ou « tujeon » tout court est un jeu d’argent, une sorte de poker, qui était très populaire en Corée pendant la dynastie Joseon. Rappelons que nombreux étaient les gens qui ont été ruinés à cause de leur passion pour ce jeu, si bien que l’Etat l’a finalement interdit, sans pour autant empêcher la pratique clandestine.

La meilleure combinaison de cartes au jeu de tujeon est une paire de 10 : « jangtaeng ». Ce mot est utilisé dans le langage courant au sens de « comble de bonheur ». On imagine la joie d’un joueur qui est parvenu à cette combinaison. D’un air ravi et triomphal, il étale ses cartes sur le tapis et improvise une phrase musicale. Il n’a pas assez de talent de musicien pour inventer une mélodie et reprend ainsi, à sa manière, celle qui existe déjà. Mais le texte, quant à lui, lui revient. Il ne pouvait lui être inspiré par autre chose que le nombre 10.

Les autres joueurs n’ayant pas été aussi chanceux que lui entonnent eux aussi un morceau dont les paroles sont également associées à un chiffre. Il s’agit pour eux de se plaindre du manque de chance ou de s’en consoler. La chanson « Tujeonnori » est une sorte d’anthologie des meilleurs de ces paroliers anonymes. La voici chantée par un groupe de jeunes musiciens qui, eux, préfèrent sans doute les jeux vidéo...

« Sasirengi sori » ou « chant de sasirengi » est également une chanson inventée pendant la pratique d’un jeu de société, « sasirengi ». Il se joue avec des « yeopjeon », des pièces de monnaies de Joseon, des jetons en métal avec un trou au milieu. La règle est assez simple. Les joueurs disposant d’un nombre égal de pièces de monnaies représentant différentes valeurs, portant donc différents chiffres, il s’agit pour chacun d’eux de deviner celle que le joueur suivant ne possède pas.

« Et voilà un 5 », déclare un joueur à son tour sur un ton triomphal comme s’il voulait se persuader que son adversaire n’a pas de pièce équivalente. Il peut lui arriver d’improviser une petite phrase musicale avec le chiffre 5. Voici celle qui est retenue dans le « Chant de sasirengi » :

Cinq frères qui s’entendent bien
Sont contents d’être copropriétaires
Des champs et des rizières

Le chiffre 5 en sino-coréen est « o ». « S’entendre bien » est la traduction de l’adjectif « osondoson ». Ainsi, le début du texte cité sonne bien à l’oreille : « Osondoson o hyeongje ». Le joueur suivant, s’il a une pièce de valeur 5, peut riposter également avec une phrase musicale.

Une partie de jeu ne se déroule jamais en Corée dans une ambiance tendue, et ce même dans le cas d’un jeu associé à un intéressement financier à l’issue de la partie. En fait, comme les joueurs sont bavards ! Ils commentent le coup de leur adversaire, tantôt en l’appréciant, tantôt en s’en moquant. Ils exagèrent leur joie ou leur déception. Ils ne cachent pas leur jalousie devant la chance qui a touché l’un d’entre eux et l’expriment parfois avec des mots désagréables. Tout cela a pour but de jouer sur les nerfs de leurs adversaires.

« Echec ! » déclare triomphalement un joueur de xiangqi, échecs chinois, « janggi » en coréen. Son adversaire cherche un coup pour s’en sortir. Il réfléchit et réfléchit encore. Le joueur qui l’a mis en échec le raille : « On dirait que mon partenaire de jeu n’est plus. S’est-il dérobé ? » Le malheureux joueur a l’air énervé par ces mots, ce qui perturbe sa réflexion. Il parvient toutefois à jouer un coup pour mettre fin à l’échec. « Voilà le vaillant général Machao qui vient au secours ! » Il a en réalité déplacé un de ses deux chevaux, « ma » en chinois, l’homophone du patronyme d’un personnage du célèbre roman historique chinois, « Les Trois royaumes », très populaire aussi en Corée.

Alors qu’il arrive souvent aux joueurs de janggi de citer le nom d’un protagoniste de ce roman à chaque fois qu’ils déplacent une pièce, il s’agit d’une référence anachronique, car les caractères chinois inscrits sur les pièces l’attestent, ce jeu de société a été inventé de façon à représenter l’opposition des deux grandes puissances, Zhao et Han, antérieure à celle des Trois royaumes. Cela n’empêche pas d’apprécier une chanson née pendant la pratique du « janggi » avec un texte fantaisiste.

Liste des mélodies de la semaine
1. « Tujeonnori  » chanté par Yegyul Band.
2. « Chant de sasirengi » chanté par SssinSsing.
3. « Janggi taryeong » chanté par Ko Geum-seon et Kim Bo-yeon.

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