« Cinquante poèmes, Les ailes et poèmes complètes », recueil de textes de Yi Sang traduits, présentés, commentés et annotés par Kim Bona, paru aux éditions William Blake & Co. en 2002.

* Présentation du poète :
Yi Sang termine ses études en mai 1929 et fait ses premiers pas dans la vie active en tant qu'ingénieur architecte. L'année suivante, il publie son premier roman « Le 12 Décembre » dans la revue Joseon. En 1931, son oncle s'éteint et Yi Sang, lui aussi tombé malade, consulte un médecin qui diagnostique la tuberculose.

Selon la traductrice Kim Bona, au lieu de soigner sérieusement sa maladie, il se consacre de plus en plus à la poésie. « A 21 ans, il publie en japonais ses premiers poèmes dans une revue L'Architecture et la Corée. Il n'est pas encore vraiment reconnu comme poète. Malgré tout, quelques poèmes dont Une étrange réaction réversible, Vue à vol de corbeaux et Le tracé en trois dimensions suscitent déjà l'intérêt et la curiosité de ses amis lettrés et provoquent un scandale chez les lecteurs. [...] Il persévère dans son style qui bouscule les normes admises et approfondit son intention de créer du neuf, tant dans la forme que pour le fond de ses poèmes. Ceux-ci peuvent même parfois ne comporter qu'une série de chiffres transcrits dans le reflet d'un miroir ou une juxtaposition de mots qui produisent un effet visuel, où il emploie des termes d'architecture, de mathématiques, des schémas, etc. »

Dès mars 1933, l'état de Yi Sang empire. Il est obligé de renoncer à son métier d'ingénieur. Il part en voyage avec un ami peintre, Ku Bon-ung à la source thermale de Baecheon, où il habitera quelque temps avec une gisaeng du nom de Geumhong. Il revient à Séoul avec elle pour ouvrir un café baptisé L'hirondelle. Yi Sang occupe un recoin sombre dans le café qu'il appelle « La chambre de Dostoïevski » et y réunit souvent ses amis.

En septembre 1935, le café fait faillite et Geumhong disparaît. Le poète ouvre plusieurs cafés qui, tour à tour, fermeront leur porte par suite de sa mauvaise gestion. L'année suivant, en juin, il se marie avec une femme lettrée du nom de Byeon Dong-rim sans aucune assistance à la cérémonie. En septembre de la même année, il publie la célèbre nouvelle « Les Ailes » dans la revue Jogwang.

D’après la traductrice Kim Bona, il embarque pour Tokyo peu de temps après son mariage, ce qui suggère que cette union ne lui a pas apporté le bonheur. Elle ajoute : « Il est isolé et désespéré. La police japonaise l'arrête en février 1937. C'était une erreur, mais il avait le tort d'être Coréen. Il reste 31 jours en prison et il en sortira la santé complètement délabrée, plutôt mis à la porte que libéré ! Il entre à l'hôpital de l'Université Waseda à Tokyo. Il est trop tard pour qu'un traitement quelconque puisse être tenté. Son ami Kim Yu-jeong, qui lui avait écrit de rentrer en Corée, meurt le 29 mars. Sa femme viendra l'assister et le veiller sur son lit d'hôpital. Le 16 avril 1937 son père meurt et, ce même jour, sa grand-mère Mun. Il n'en saura rien car, à l'aube du 17 avril, exilé en terre étrangère, Yi Sang s'éteint. Il était âgé de 26 ans et sept mois. »

* Poème

Mouvements

Au-dessus du premier étage au-dessus du deuxième étage au-dessus du troisième étage il y a la terrasse et son jardinet. Je suis monté j'ai regardé au Sud. Rien. J'ai regardé au Nord. Rien. Au-dessous de la terrasse et de son jardinet au-dessous du troisième étage au-dessous du deuxième étage au premier étage je suis descendu. Le soleil se lève à l'Est et se couche à l'Ouest le soleil se lève à l'Est et se couche à l'Ouest le soleil se lève à l'Est et se couche à l'Ouest s'étant levé à l'Est il occupe l'aplomb du ciel. Je regarde alors ma montre qui est arrêtée mais qui indique l'heure juste. Ma montre est plus jeune que moi ou plutôt je ne suis pas plus vieux que ma montre. J'ai du mal à y croire sans doute faut-il qu'il en soit ainsi finalement j'ai jeté cette montre.