Transfert de la capitale à Sabi

En 475, le roi Jangsu de Goguryeo, un ancien royaume coréen situé au nord de la péninsule, a mobilisé 30 000 soldats pour attaquer Hanseong, la capitale du royaume de Baekje. Quand la ville fut conquise par ses ennemis, Baekje a transféré sa capitale à Ungjin dans le but de repousser les menaces de son pays voisin et de réorganiser le régime étatique.

Un demi-siècle plus tard, en 538, Baekje a déplacé à nouveau la capitale, cette fois-ci plus au sud, à Sabi, qui est aujourd’hui rebaptisé Buyeo dans la province de Chungcheong du Sud, avec le rêve d’étendre son territoire. Le pays a ensuite changé de nom pour Nambuyeo afin de mettre l’accent sur la tradition de la tribu Buyeo. Le roi Seong, le souverain d’alors, rêvait ainsi d’une renaissance nationale.



Un nouveau chapitre dans l’histoire de Baekje

« Il était intelligent, extraordinaire et déterminé, c’est pourquoi le peuple lui attribua le nom posthume Seong. »

C’est ainsi que ce monarque est décrit dans le « Samguk Sagi », les chroniques des Trois Royaumes. Il monte sur le trône en mai 523, succédant à son père Muryeong. Son nom posthume Seong, qui signifie « roi sacré », vient du mot « cakravartin », ou « celui qui fait tourner la roue de la loi ». Issu du bouddhisme, le terme désigne un monarque universel.

Avant l’apparition de Seong, le roi Dongseong avait renforcé l’alliance avec le royaume voisin de Shilla pour retrouver le Baekje glorieux du 4e siècle. Au 6e siècle, le roi Muryeong a mis en place 22 districts administratifs spéciaux nommés « Damro » à travers le pays. Quant au roi Seong, il rêvait, après le transfert de la capitale à Sabi, de solidarité interne et de la récupération du territoire perdu.

Le souverain cherche à promouvoir le bouddhisme en vue de renforcer la base spirituelle de la nation. Il donne également beaucoup d’importance aux questions diplomatiques : il invite les savants bouddhistes de la dynastie chinoise Liang, ce qui contribuera grandement à l’amélioration de la qualité de la culture du pays. Qui plus est, il concourt à la propagation du bouddhisme et divers éléments culturels coréens au Japon, où il sera appelé le roi Seongmyeong, c’est-à-dire le roi saint et brillant.


La fin tragique

Après avoir fait déplacer la capitale à Sabi, Seong se concentre sur la reprise du bassin du fleuve Han occupé par Goguryeo. En 551, il forme un front uni avec Shilla et la confédération de Gaya.Les forces alliées dirigées par Baekje réussissent à récupérer la région en question, mais la joie ne durera pas longtemps car le roi Jinheung de Shilla ne tardera pas à s’en emparer. En 554, le monarque de Baekje lance une attaque militaire contre Shilla malgré l’opposition des pacifistes. Le prince héritier Chang mène l’opération avec 30 000 soldats, qui semblent au début avoir le dessus sur leurs ennemis. La bataille atteint son apogée à la forteresse de Gwansan, aujourd’hui dans la province de Chungcheong du Nord. Les forces de Shilla y font une attaque surprise et le prince se retrouve isolé sur le champ de bataille. Le roi court vers son fils pour le sauver, mais il finira par être capturé par un soldat de Shilla puis aura une fin humiliante. La mort de Seong provoque un grand désordre dansl’armée de Baekje : quatre généraux et 30 000 soldats périssent.

Après avoir passé 32 ans sur le trône, le roi Seong quitte ce monde sur le champ de bataille, ce qui entraîne la fin de l’alliance Shilla-Baekje qui aura duré plus d’un siècle.La coalition avec la dynastie des Liang et le Japon sera également menacée. Le pouvoir royal s’affaiblira progressivement au profit d’un nouveau régime aristocratique mené par les anciennes tribus locales.




Le rêve s’évanouit

Il est difficile trouver un personnage qui a mené une vie plus tumultueuse que le roi Seong dans toute l’histoire de Baekje. En rêvant d’un nouveau départ pour son royaume, il a fait transférer la capitale, réorganisé le régime, récupéré le territoire jadis occupé par Goguryeo, pris l’initiative des échanges culturels autour du bouddhisme. Malheureusement, il a sombré dans les coulisses de l’histoire sans réaliser son rêve.