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Culture

L'auteur et son sujet fétiche (1) : Kim Jung-hyuk et la musique (7)

2015-02-19

L'auteur et son sujet fétiche (1) : Kim Jung-hyuk et la musique (7)
« Je n'ai toujours pas écrit les premiers mots », une nouvelle de Kim Jung-hyuk traduite du coréen par Moon So-young, Lee Seung-shin, Hwang Ji-young, Lee Tae-yeon, Jeong Hyun-joo, Lee Goo-hyun, Aurélie Gaudillat, publiée dans « Bus errant » paru chez Decrescenzo éditeurs en 2013.

* Extrait:
Ko Shin-hee révèle à notre narrateur son projet de créer un magazine consacré aux modes d'emploi et lui propose d'accepter le poste de rédacteur en chef. Il accepte non sans hésitation sa proposition à une condition ; son équipe se charge de la rédaction mais pas du service commercial, ni de la vente.

Pages 51 à 52 :
« Les modes d'emploi du siècle qui ont révolutionné la vie sur notre planète » tel était le thème du premier numéro. Nous avons consacré la majeure partie de notre temps à la préparation de ce numéro spécial. Nous avons chiné dans les bouquineries, fouillé dans les bibliothèques pour trouver les modes d'emploi d'appareils électroniques ayant marqué l'histoire. Nous avons même publié des annonces dans des journaux : « Achetons modes d'emploi. Si vous en avez au grenier, merci de nous contacter. » La tâche n'a pas été aisée mais, collecter ces modes d'emploi nous donnait l'impression d'accomplir une mission historique. En un mois, nous avons réuni environ cinq mille modes d'emploi. Parmi eux, un grand nombre décrivait des produits rares que nous n'avions jamais vus, et dont nous n'avions jamais entendu parler. Beaucoup de ces manuels étaient bons à jeter. [...]
Deux mois plus tard, « Man-u » voyait le jour. S'inspirant du terme « manuel », Quick Mouse et le nouveau ont trouvé cette idée pour le titre du magazine. Comme nous l'avions prévu, le public ne s'est pas montré très réceptif. Hormis une interview dans un journal spécialisé sur les produits électroniques et quelques articles publiés dans des magazines, aucune réaction enthousiaste. Ko semblait déçue mais je lui ai expliqué qu'il fallait attendre au moins six mois pour juger du succès ou de l'échec du magazine. Elle a finalement acquiescé d'un hochement de tête. J'étais encouragé par le succès du Planet player. Son succès n'était pas dû à notre mode d'emploi mais je voyais cela comme un bon présage pour « Man-u ».
Le nombre de lecteurs augmentait chaque jour. Au bout de cinq mois, les ventes ont décollé. De plus en plus de lecteurs nous envoyaient leurs modes d'emploi numérisés. Nous avons été reconnus dans le milieu de l'électroménager, des sociétés nous ont également envoyé leurs modes d'emploi avant la sortie de leurs nouveaux produits. [...]


Un jour, Ko téléphone au narrateur pour l'inviter au dîner avec son chef.

Pages 54 à 57 :
– Bonsoir !
Stupéfait, je reste planté un moment à regarder « le » chef attablé.
– Avez-vous un problème ? me demande « le » chef.
– J'ignore pourquoi, je pensais que vous étiez un homme. Veuillez m'excuser, je n'ai su dissimuler ma surprise.
– Ha, ha ! Je comprends. Vous imaginiez que le chef d'une société de produits électroniques était un homme, n'est-ce pas ? [...]
– Je suis désolé. Quelle maladresse ! Comment ai-je pu imaginer qu'une charmante patronne puisse être un homme...
La patronne est petite et menue. Son cou, ses bras, ses jambes, elle est fine de partout. En les voyant debout côte à côte, le contraste avec Ko est frappant. Elle semble plus âgée que Ko mais son regard pétille de jeunesse et les traits de son visage sont plus nets. [...]
– Vous souvenez-vous de la boîte à musique dans le dernier numéro ?
Je parcours machinalement la liste des modes d'emploi. La boîte apparaît instantanément dans la fenêtre de résultats de mon cerveau – l'image d'un mode d'emploi scanné en noir et blanc envoyé par un lecteur.
– Oui, je m'en souviens. Une boîte à musique en forme de balle. Il faut la tordre sur un côté pour entendre la musique... Un produit très sophistiqué, paraît-il.
– Vous voyez de quoi il s'agit. J'en ai une.
– Vraiment ? Acceptez-vous de me la montrer ? Le mode d'emploi était trop vieux, la photo n'était pas très lisible.
La patronne sort la fameuse boîte de son sac à main et me la tend. Elle est plus lourde qu'elle n'y paraît. À peine plus grosse qu'une balle de base-ball, elle ressemble à un ballon de basket mais est aussi lourde qu'un marteau. Je n'ai aucune idée du matériau utilisé pour fabriquer cette boîte, il semble résistant. Je me remémore le mode d'emploi, j'essaie de tordre la balle. Rien, aucune mélodie ne sort.

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