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The Boy from Nowhere : Jeju, le surf et les immigrés

2020-05-20

Séoul au jour le jour


Le cinéma indépendant a peut-être une chance d'avoir un public grâce au retrait des films des compagnies des écrans sud-coréens en raison de la propagation du nouveau coronavirus. C'est le cas de « The Boy From Nowhere» de Choi Chang-hwan qui est sorti le 14 mai au milieu des masques et des gels alcooliques. Le film a reçu le prix spécial du jury au dernier Festival international du film de Jeonju en 2019. Le titre international ne semble pas forcément le meilleur par rapport au « Garçon qui marche sur la vague », un titre coréen aussi poétique qu'alambiqué mais qui évoque bien les intentions du jeune réalisateur : cet été-là, il a rencontré la vague qui a changé sa vie. Nous allons voir ce qu'il en est.


* Jeju et l'immigration

En fait, le titre anglais international évoque un des aspects du film, celui du jeune homme issu de la deuxième génération de migrants sur Jeju. Il s'adapte mal et fait un tour en taule pour violence. Mal barré pour s'intégrer à la société de l'île paradisiaque, il fait les 400 coups avec un pote (les deux acteurs sont Kwak Min-gyu et Kim Hyun-mok), en particulier, en se mêlant du trafic, très actif, des travailleurs étrangers illégaux sur l'île. Mais ce n'est qu'un aspect du film. Car survient la rencontre avec des surfers pure-sang de Jeju. Et la romance commence, à la fois pour une jeune fille (jouée par Kim Hae-nah) et pour le surf qu'elle lui enseigne. L'intégration serait-t-elle au bout de la vague ? Le film fait bien sûr, un peu penser à « A Scene at the Sea » de Kitano Takeshi : quelques plans étirés sur le bleu de la mer et ses vagues blanches, des attitudes statiques des personnages très jeunes au couché de soleil. Il ne manquerait plus que la musique de Joe Hisaishi et surtout la puissance du nihilisme kitanien.


*Intégration sociale et références

Si le thème de l'intégration sociale des migrants de seconde génération est courageusement abordé sa solution laisse rêveur. Les jeunes immigrés de Jeju comme d'ailleurs sont marginalisés de part leurs origines (d'où l'erreur du titre anglais, car personne n'est vraiment de nulle part). Le gangstérisme est, effectivement, ce qui les guette, mais avant tout, c'est la misère et la stigmatisation raciale. L'anti-racisme concerne surtout le pays d’accueil, et le film, avec la pétillante et svelte actrice Kim Hae-nah, montre que l’accueil est des plus chaleureux sur l'île touristique. Le problème d'identité des enfants de migrants est probablement plus complexe, et n'est sûrement pas dans l'oublie de leurs origines ni dans leur culte, mais plutôt dans leur maîtrise consciente. Quant à l'intégration, en France on connaît bien cette politique éculée et ses limites, elle part d'une situation donnée idéologiquement vue comme statique et ethnocentriste. Evidemment, les anthropologues et historiens le savent, le futur a toujours été dans la fusion, la transformation et la mixité.


*Indépendance et pandémie

Il aura donc fallu une pandémie pour que quelques films indépendants sud-coréens atteignent les écrans des salles et donc, un peu, de public (même masqué). Le prix spécial du jury du Festival de Jeonju est pourtant soutenu par de jeunes acteurs de talents comme Kwak Min-gyu déjà vu sur « Birthday » produit par Lee Chang-dong et Kim Hyun-mok déjà vu dans « The Dude in Me ». Et surtout Kim Hae-nah, actrice solaire montante à suivre, qui n'hésite pas à commencer une carrière internationale en alternant long-métrages indépendants en Corée du Sud ou en Chine, des rôles de mère travailleuse dans « Kim Ji-young : Born 1982 » ou encore dans « The Villainess ».


Au final, le boum du nombre de films indépendants sud-coréens (50 % de la production réelle locale), porté par le succès international du cinéma du pays du Matin clair, devrait pousser les compagnies de distribution à revoir leur copie et à se remettre en question. Sinon, il faudra attendre la prochaine pandémie.

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