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L’hiver chanté en gukak

Les Coréens associent traditionnellement la saison hivernale à une longue nuit froide, celle qui devrait être terrible notamment pour un ou une célibataire insomniaque. Est-ce la solitude, d’autant plus affreuse qu’il fait froid dehors et que la nuit est longue, qui a inspiré à Hwang Jini, une poétesse du XVIe siècle, cet admirable « sijo », un tercet ? 


Une longue nuit d’hiver, j’en découpe une partie au milieu

 Je l’enroule et la met dans mon lit parfumé de printemps

 Je la déroulerai pour accueillir mon amour


On peut s’amuser à imaginer ce qu’une femme sans génie littéraire aurait dit pour exprimer le même souhait : « Ne reste pas comme ça grelottant, idiot. Viens me rejoindre dans mon lit. Je l’ai bien chauffé. » Paroles d’une provocatrice. Peut-être que certains hommes les apprécient davantage que celles de Hwang Jini. Celles-là ont tout de même peu de chance d’être adoptées pour un chant, alors que le poème cité est chanté sous forme d’un « gagok », « chant lyrique ». 


Le mois de décembre où commence l’hiver selon le calendrier s’associe à Noël, pour les chrétiens ou non. Et il existe un numéro de pansori, une création contemporaine, chantant la vie de Jésus. Il a été créé à l’initiative d’un certain Cho Hyang-rok, un pasteur dans les années 1970. Adorateur de Jésus Christ et aussi amoureux du gukak sans doute, il a écrit une biographie du sauveur du monde dans le but qu’elle soit chantée en pansori. Il contacte alors un professionnel en la matière, un certain Park Dong-jin, et lui propose de mettre en musique le texte qu’il a écrit. Park, un chanteur de pansori, accepte, et ce, selon son aveu postérieur, essentiellement par envie d’être médiatisé. En effet, le pasteur lui a promis la présentation de sa création, chantée par lui-même, sur une chaîne de radio chrétienne. 


Au moment où il s’est mis à l’adaptation musicale de cette biographie de Jésus, notre chanteur de pansori n’était pas croyant. Or, à force de lire et de relire la vie du Saint ou du Dieu vivant afin de l’incarner musicalement le mieux possible, le voici devenu chrétien. A quel moment précis a-t-il été converti ? Comme il disait n’en savoir rien lui-même, c’est à Dieu seul de le savoir. Sa création musicale a-t-elle été guidée par le Saint-Esprit ? C’est également à Dieu seul de le savoir. 


Le christianisme en Corée a une assez longue histoire. C’est au XVIIe siècle que le catholicisme, appelé alors « Seohak », « Science de l’Ouest » selon la traduction littérale, a été introduit dans la péninsule coréenne. C’étaient les interprètes attachés au ministère des Affaires étrangères de la cour royale de Joseon et ayant comme mission d’accompagner les diplomates dans leur voyage en Chine, qui étaient les premiers à s’intéresser au catéchisme, via « Tienzhu Shiyi », un livre théologique écrit en chinois par le missionnaire italien Matteo Ricci à Pékin. Cette doctrine religieuse professant notamment l’égalité des hommes devant Dieu a fait ses premiers adeptes parmi les plaignants non déclarés de la hiérarchie sociale, dont lesdits interprètes justement, roturiers par leur naissance, mais possédant un patrimoine considérable grâce à l’import-export qu’ils faisaient en profitant de leur voyage en Chine. 


Une découverte archéologique récente montre toutefois que l’histoire du christianisme en Corée remonte encore plus loin. A Gyeongju, l’ancienne capitale du royaume de Shilla, on a découvert une croix et une statuette de la Vierge Marie datant de la période du VIIe au Xe siècle. Le christianisme était donc connu des Coréens de l’époque. Selon toute vraisemblance, le nestorianisme, une doctrine christologique ayant comme berceau Constantinople, a été introduit dans le royaume de Shilla via ses échanges culturels avec la Chine des Tang ; celle-ci faisant du commerce avec le Moyen-Orient. 


Aujourd’hui, le christianisme est, en nombre d’adeptes, la première religion en Corée du Sud. Au niveau culturel, les artistes dans différents domaines y puisent leur inspiration. 


Liste des mélodies de cette semaine

1. « Décembre », chanté par Ji Min-ah. 

2. « La Nativité » dans « La Vie de Jésus » chanté par Park Dong-jin. 

3. « Winter Wonderland », sonate pour gayageum jouée par Jung Kil Seon.

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