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Cinéma & dramas

On the Line : film téléphoné

2021-11-03

Séoul au jour le jour


Les jumeaux du cinéma de Corée du Sud, alias Kim Sun et Kim Gok, bien connus pour leurs films d'horreur politiques et déjantés, tentent ici le mainstream avec le thriller « On the Line » pour CJ Entertainment. Cette histoire d'arnaque par téléphone, sorti cet automne qui nous mène en Chine, est soutenue par trois jeunes second couteaux du cinéma actuel, les stars potentielles, Byun Yo-han, Kim Mu-yeol et Park Myung-hoon.


* Attention à la voix

Disons-le d'emblée, les facétieux jumeaux du cinéma « made in Korea » nous avaient habitués à des intrigues plus retorses. Ici, on commence avec une voix, celle de Kwak Pro qui vient consoler des âmes en peine. Mais c'est juste avant de leur piquer leurs économies rudement gagnées. Les voix sont essentielles au cinéma comme à la radio, elles peuvent hypnotiser comme celle du film et rapporter beaucoup d'argent. Donc ici, l'ancien flic joué par Byun Yo-han se fait hameçonner par une douce voix sirupeuse. Le jeune homme bosse à Busan dans le bâtiment. Avec son épouse, il rêve d'une maison. Mais voilà, la voix passe par là et le fric de la maison entre autres se défile en Chine. La femme en remet une couche en réinvestissant dans la voix diabolique et le pauvre Byun s'encadre en voiture. Mais notre héros ne lâche pas son magot pour autant, et se transforme en superman de la com', s'acoquine avec un hacker etc ; bref, il connaît soudain tous les tuyaux, réseaux de drogues inclus. Et le film tourne au capharnaüm indigeste.


* Capitalisme à tous les étages

« On the Line » ne serait qu'un téléfilm du dimanche après-midi si les jumeaux n'y avaient mis leur grain de sel anti-capitaliste. En effet, les méchants auteurs des appels téléphoniques et des détournements de fonds ne sont pas les habituels méchants essentialisés (« naturels ») de nombreux films, cinéma et TV comprises. Il s'agit d'une compagnie capitaliste qui porte bien sur elle ; avec sa hiérarchie de bureaucrates, ses réunions pipées, ses bonus et vacances mendiés à couteaux tirés par des bataillons de médiocres grattes-papiers, mais tous portés par l'idéologie capitaliste du succès. Eh oui, l’hameçonnage criminel est aussi une source de carrière et de succès lucratifs. C'est dans ces tours chinoises du nécro-capitalisme que grimpe notre héros infiltré pour le meilleur et pour le pire. Les jumeaux Kim nous avait habitué à porter des coups de griffes politiques au sein de leurs films d'horreur (voir «Exhausted » ou encore « White »), et au moins depuis leur « Capitalist manifesto » en 2003; ils n'ont pas oublié de le faire ici, heureusement.


* La menace de Chine

On connaissait la muraille de Chine, il va falloir compter sur la menace de Chine. En effet, il est de plus en plus clair dans le cinéma de Corée du Sud que ce qui vient de l’empire du Milieu sent le souffre. Le rêve de la conquête du marché chinois du cinéma semble s'éloigner de films en films. Dans « On the Line » les habituels truands chinois du cinéma (parfois issus de la zone autonome coréenne de Yanbian) sont purement et simplement transformés en bureaucrates capitalistes, c'est-à-dire en petites mains officielles de la classe dirigeante. Fini donc les loubards au front bas, voici venir les vrais gangsters. L'ironie de Kim Gok et Kim Sun est évidente derrière les poncifs du thrillers resucés à l'envie. Elle se manifeste aussi dans cette histoire de voix téléphonique car le lien est fait avec l'ensemble des techniques de communication y compris internet et ses réseaux sociaux. La Chine encore est connue pour entretenir des compagnies entières d'influenceurs, de « likeurs », de faux commentateurs de blogs etc. Au départ, faisant partie de campagnes marketing d'avant-garde, ses centaines de milliers de manipulateurs du numérique sont aussi devenus des armes politiques. Services secrets en tous genre, administration gouvernementales chargées des sombres besognes, sociétés d'affaires discrètes sont légions derrière les youtubeurs stars et autres rois du tweet.


* Les jumeaux au croisement ?

Bref, si « On the Line » est loin d'être le meilleur film des jumeaux Kim, il marque pour eux un nouveau passage par la case des productions mainstreams. Ce n'est pas la première fois. Le film d'horreur situé dans le milieu de la K-pop, « White : the Melody of the Curse » était déjà orienté vers le mainstream mais fut un échec. Les « Horror Stories » demeurent les meilleurs box-office des jumeaux même si réservés au plus de 19 ans. Le résultat au box-office de ce thriller sans envergures reste sur la sellette. Car le fait de sortir sur les écrans durant la pandémie en l'absence de la plupart des blockbusters des monopoles peut lui faire attraper un succès en trompe-l’œil.

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