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Culture

L'auteur et son sujet fétiche (1) : Kim Jung-hyuk et la musique (4)

2015-01-29

L'auteur et son sujet fétiche (1) : Kim Jung-hyuk et la musique (4)
« Piano mécanique », une nouvelle de Kim Jung-hyuk traduite du coréen par Moon So-young, Lee Seung-shin, Hwang Ji-young, Lee Tae-yeon, Jeong Hyun-joo, Lee Goo-hyun, Aurélie Gaudillat, publiée dans « Bus errant » paru chez Decrescenzo éditeurs en 2013.

* Extrait:
Vito Genevese n'est finalement pas venu au rendez-vous. Quant à notre pianiste, il prend l'avion le lendemain matin, toujours pas remis de sa soirée et gâche complètement le concert qu'il donne deux jours plus tard. Le jour suivant, de retour à la maison, il découvre que son piano est arrivé avec une enveloppe.

Pages 93 à 95 :
Elle contenait deux CD et un mot du directeur. « Sans prétention aucune, vous noterez la rapidité de notre service de livraison ! » Il y avait aussi un accordeur automatique. Les deux albums étaient des bandes originales de Vito Genevese, « Perdu dans le brouillard » et « Industrial ». J'ai mis dans le lecteur CD celui que je ne connaissais pas. La musique était soporifique. Il avait sans doute voulu exprimer la sensation d'être « perdu dans le brouillard ». La mélodie était décousue, la structure trop répétitive, et le piano en décalage avec les autres instruments. J'ignore à quel moment je me suis endormi, en tout cas, je n'ai pas dû tenir plus de dix minutes. Quand le téléphone m'a réveillé, les enceintes déversaient toujours la musique. Combien de temps s'était écoulé ? Je n'en avais aucune idée. J'étais comme prisonnier du brouillard. Sans même penser à baisser le volume, j'ai décroché le téléphone. J'ai crié plusieurs fois « Allô ! » mais personne ne répondait au bout du fil. Soudain dans une quinte de toux, une voix a jailli du combiné :
– Euh... C'est Vito Genevese. [...] Vous écoutez ma musique ?
Alors seulement, j'ai répondu : « Ah, Monsieur Vito ! ». La musique allait crescendo. Elle s'envolait vers son paroxysme.
[...]
– Je vous demande pardon pour l'autre jour. J'ai eu une urgence, je n'ai même pas pu vous prévenir... J'aurais aimé vous rencontrer !
Ses mots ne sonnaient pas faux. Aux seules vibrations de la voix, une oreille avisée peut deviner si une personne est sincère. Il en va de même pour savoir si un pianiste joue avec son cœur ou pour épater les autres. Il m'a expliqué la raison de ce faux bond, mais comme ce n'était pas important pour moi, j'ai aussitôt oublié cette partie de notre conversation.
– Moi aussi, je voulais vous rencontrer. Depuis que j'ai vu « Industrial », je suis devenu l'un de vos fans. Vous jouez du piano comme d'un clavecin. [...] Vos créations musicales sont de vraies merveilles. N'importe quel pianiste digne de ce nom peut s'en rendre compte dès la première écoute.
En prononçant ces mots « Vos créations musicales sont de vraies merveilles », j'ai pensé « Oups ! » Inconsciemment, j'éprouvais sans doute encore quelque hostilité à son égard.


Pendant une heure, notre narrateur et Vito parlent de la musique et en une heure, ils deviennent amis. Contrairement à l'avis du directeur de Partita qui a parlé de l'Italien comme d'un « vieux grincheux », il est aimable et donne de précieux conseils en écoutant attentivement le jeune pianiste. Ce dernier invite son nouvel ami qui n'est pas retourné dans une salle de concert depuis plus de vingt ans à sa représentation qui aura lieu près de chez lui.

Pages 95 à 96 :
– Ah, ah ! Vous me mettez dans l'embarras. Dans ce cas, je vous téléphonerai et vous laisserez votre mobile allumé pendant le concert. Ainsi, je pourrais vous écouter jouer. Après, on ira prendre un verre ensemble.
Je regrette d'avoir insisté autant. Je voulais probablement lui prouver qu'il avait tort et moi raison. J'avais beau vouloir me chercher des excuses, mon comportement était puéril. Il a habilement détourné la conversation pour parler de nos pianos. Après tout, nous étions les deux seuls à posséder un Partita CD319. Il m'a demandé si je l'avais essayé, j'ai répondu que je n'avais pas encore eu le temps.
– Vous pourriez en jouer maintenant ? Cela vous dérangerait ?
– Je n'ai même pas fini de le déballer. Et avant de jouer devant un virtuose, je dois m'entrainer un peu, vous ne croyez pas ?
– Ah ! Ah ! Je vous en demande un peu trop. Ce sera pour une prochaine fois...

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