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Culture

Les nouvelles (2) - « L'homme aux neuf paires de chaussures » de Yun Hung-kil (1)

2016-03-17

Les nouvelles (2) - « L'homme aux neuf paires de chaussures » de Yun Hung-kil (1)
« L'homme aux neuf paires de chaussures », nouvelle de Yun Hung-kil traduite du coréen par Im Hye-gyong et Cathy Rapin, publiée dans « La Mousson » paru aux éditions Autres Temps en 2004.

* Présentation de l'auteur :
Yun Hung-kil ou Yun Heung-gil voit le jour en 1942 à Jeongeup dans la province de Jeolla du Nord. Il étudie la littérature coréenne à l'université Wonkwang qui se trouve à Iksan dans la même région. Il remporte le concours des jeunes écrivains du journal Hankook en 1968 avec la nouvelle « Saison de la couronne grise », ce qui marque son entrée en littérature. Ecoutons un extrait de la préface du recueil de nouvelles « La Mousson », publié en France en 2004 chez Autres Temps.

« La publication, en 1968, de son premier texte, Saison de la couronne grise, primé par le journal Hankook, a été un succès. Cette nouvelle a été suivie de plusieurs autres recueils de textes courts, que nous présentons ici, et d'un premier roman, en 1978, La Mer de l'apocalypse. Mais Yun, débordé par son écriture, ne pouvait plus vivre sa vie d'enseignant du primaire, puis du secondaire, et devait décider de se consacrer finalement à son œuvre et démissionner de son poste.
Yun est alors devenu ce conteur qui tisse des liens symboliques entre les êtres, les lieux et les choses. Il s'est mis à scruter avec une émotion profonde l'individu tissé dans ses coutumes, ses croyances et les moments de la grande histoire, plongeant au cœur de sa terre du Sud, avec cette langue de province aux intonations fortes et chaleureuses, ou mettant en scène des quartiers des villes atteintes de gigantisme. Il a été reconnu comme l'un des grands écrivains coréens contemporains dont la sensibilité de plume touche profondément le lecteur, qu'il soit coréen ou étranger. Plusieurs de ses romans et nouvelles ont traversé les frontières. »

A partir de 1977, Yun se consacre exclusivement à la littérature, publiant nouvelles et romans, dont certains ont été traduits en français : le roman « La Mère » et le recueil de nouvelles « Los Angeles d'un rêveur » chez Picquier respectivement en 1994 et en 1997, le recueil « La Mousson » chez Autres Temps en 2004.

* Extrait :
« L'homme aux neuf paires de chaussures » fait partie des quatre histoires d'un même ensemble qui ont pour cadre la ville de Seongnam - ou Songnam - et ses bouleversements socio-économiques et politiques sous la dictature dans les années 1970. Ces quatre nouvelles qui dénoncent les conditions de vie des ouvriers et employés tournent autour de deux personnages centraux : M. Kwon et M. Oh. Si Kwon qui est une victime du système, successivement employé, ouvrier, journalier, manifestant, intermittent au chômage, Oh est l'instituteur et propriétaire du nouveau logement de Kwon. Dans « L'homme aux neuf paires de chaussures », Oh raconte l'arrivée de la famille de Kwon chez lui. Ce dernier est surveillé par la police et au bord de suicide après une vie de luttes vaines contre un système oppressif.

Pages 113 à 114 :
Dès le départ, contrairement à ce que j'espérais, tout était parti de travers. Après avoir acheté, avec beaucoup de difficultés, une maison à Songnam, nous avions décidé de louer l'une des chambres pour contrebalancer un tant soit peu nos excédents de dépenses. Ma femme et moi étions certains d'être les meilleurs propriétaires du monde et nous en avions conclu que notre futur locataire ne saurait être qu'un chanceux rêveur de dragon. Nous exigions donc de notre locataire qu'il soit au moins aussi bon que nous. Pourtant, d'une certaine façon, nous avions l'impression que nos espoirs s'en allaient à vau-l'eau, l'un après l'autre. Un certain sentiment de trahison atteignit son point culminant quand M. Yi, un policier qui était passé me voir à l'école en tenue civile, m'avait parlé de notre locataire, M. Kwon, que l'on avait bien enregistré comme étant résident chez nous.
« ... Pas la peine de vous sentir obligé. Je ne vous demande pas un rapport journalier en bonne et due forme. Seulement, s'il fait quelque chose qui sort un peu de l'ordinaire, par exemple s'il part longtemps en voyage, si quelqu'un de louche vient le voir, s'il a faim parce qu'il n'a plus de riz ou s'il n'a plus de charbon, ou encore s'il a soudain beaucoup d'argent... »
Il me paraissait clair que la notion d'obligation, pour ce policier, était plutôt équivoque. Mais, pour le moins que je puisse dire, ce n'était pas quelque chose au sujet duquel nous pouvions avoir le choix. En outre, ce n'était pas non plus une chose que les gens estimaient au point d'en trépigner pour l'obtenir. Absolument pas.
« Vous voulez que je sois votre informateur ?
— Que c'est embarrassant de le dire comme ça ! »

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