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Culture

Les nouvelles (3) - « Hôtel Plaza » de Kim Mi-wol (1)

2016-08-18

Les nouvelles (3) - « Hôtel Plaza » de Kim Mi-wol (1)
« Hôtel Plaza », nouvelle de Kim Mi-wol traduite du coréen par Lucie Angheben, Cho Eunbyul, Elisabeth Hofer, Gwénaëlle Pompilio et Shin Sun-mi avec le concours de Choi Mikyung et de Jean-Noël Juttet, publiée dans « Nouvelles de Corée » paru aux éditions Magellan & Cie en 2016.

* Présentation de l'auteur :
Kim Mi-wol est née en 1977 à Gangneung dans la province de Gangwon. Après avoir étudié la linguistique à l'université de Corée et l'écriture créative à l'université des arts de Séoul, elle a fait son entrée en littérature en 2004 avec la nouvelle « Demander son chemin au jardin », récompensée par le prix Segye Ilbo du jeune écrivain. Elle a publié un roman, « La huitième chambre » et deux recueils de nouvelles, « Guide des grottes de Séoul » et « Le livre que personne n'ouvre », dans lequel « Hôtel Plaza » est incluse.

* Extrait :
Pages 9 à 11 :
Le choix de l'hôtel, c'était l'affaire de ma femme. Cette fois, elle avait proposé le Plaza. J'ai tout de suite allumé mon ordinateur : les réservations, c'était mon affaire.
La première fois qu'elle m'avait parlé d'aller à l'hôtel, cela remontait à quatre ou cinq ans. Vouloir passer ses vacances d'été dans un hôtel en ville, ça m'avait fait sourire. Appeler ça des vacances ! Non pas dans un coin sympa, mais dans un hôtel en plein centre-ville, devant lequel je passais tous les jours pour aller au boulot ! Mais qu'est-ce qu'on allait bien pouvoir faire là-dedans ?
Je m'étais finalement rallié à son opinion. A la réflexion, c'était peut-être pas si bête. Pour moi, qui considère que les congés c'est fait pour roupiller toute la journée ou regarder, confortablement calé dans un fauteuil, les matchs de la Premier League anglaise que j'avais manqués, aller dans un hôtel tout près de la maison, c'était quand même plus pratique que d'aller à perpète.
En tout cas, on s'est mis à passer nos congés à l'hôtel et, d'année en année, cela a fini par devenir un rituel. Le Sheraton Wakerhill, le Lotte de Sogong-dong, le Shilla, le Millenium Hilton, etc. Ma femme ne voulait jamais retourner dans un hôtel où nous avions déjà séjourné. Ce qu'elle semblait apprécier le plus, c'était justement le choix du nouvel hôtel où nous irions passer nos vacances. Je me posais même la question de savoir si ce qu'elle voulait avant tout, ce n'était pas, plutôt que passer ses vacances à l'hôtel, les essayer tous l'un après l'autre, à la façon de ces maîtres d'arts martiaux qui visitent tous les dojos des alentours pour les affronter, jusqu'à ce qu'il n'en reste aucun.
La différence de prix entre une chambre Supérieure, la moins chère, et une Deluxe n'étant que de quarante mille wons, le curseur est allé tout droit sur Deluxe. Ma femme, debout dans mon dos, a posé la main sur mon épaule :
– Dis, tu sais que tu as changé ?
– Moi ? Pourquoi ?
Je n'avais pas détaché les yeux de l'écran.
– Avant, tu ne manquais jamais de râler : à quoi bon aller dans ce genre d'hôtel ?
A trois cent vingt mille wons la nuit, avec les taxes et le service, c'était presque quatre cent mille wons qu'il fallait débourser.
– Tu ne te souviens pas ? Tu disais que payer une chambre d'hôtel, c'était jeter l'argent par la fenêtre.
Oui, c'est vrai, je disais ça. Même si on avait tout le confort et les services, on n'y allait que pour dormir. Alors, là ou ailleurs... Il y a quatre ou cinq ans, j'avais bien du mal à comprendre pourquoi il nous fallait payer pareille somme juste pour ça.
– C'est vrai, ai-je approuvé d'un léger signe de la tête, je me rappelle. En fin de compte, ce qui m'embête, ce n'est plus le prix de l'hôtel.
Il m'a semblé que je prenais brusquement un sérieux coup de vieux.

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