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Culture

La poésie (5) – Kim Myong-in (4)

2017-04-25

La poésie (5) – Kim Myong-in (4)
« L’Accordéon de la mer et autres poèmes », recueil de poèmes de Kim Myong-in traduit du coréen par Hyunja Kim-Schmidt et Thierry Gillibœuf, paru aux éditions Le temps des cerises en 2003.

* Présentation du poète :
Dans l’édition précédente, nous vous avons expliqué que l’image du chemin est très récurrente dans les poèmes de Kim Myong-in et qu’il a inventé une poésie qui accueille la méditation métaphysique sur notre condition humaine, la conscience de notre destin d’homme solitaire, la quête problématique de la transcendance. Nous trouvons ainsi des images symboliques ou figures métaphoriques tels que « l’oiseau », le chameau et les bancs de saumons des « Poèmes de l’Utah », l’âne de « Une maison vide sous l’eau ».

Le poète continue de creuser le sens de la marche, mais il arrive que le trajet s’achemine vers le silence ultime qui, selon la traductrice Hyunja Kim-Schmidt, le réduit au désespoir comme nous pouvons le lire dans le poème « Le silence » de son recueil intitulé Le silence du chemin. Cependant, il fait des efforts pour persévérer dans son voyage spirituel malgré les aspérités et l’incertitude d’un itinéraire fait de nombreux chemins sombres et enchevêtrés.

* Poème

Une maison vide sous l’eau

Ô l’âne, si ce voyage pénible qui t’est infligé
est de faire le chemin au crépuscule fugitif
le village de l’autre rive est déjà effacé sous l’ombre de la montagne
Lorsque je détache la charrette vide
quelque part le bruit des roseaux qui s’entrechoquent
Le solstice d’hiver étend le crépuscule à peine rouge
Un faisceau lumineux qui escalade
de toutes ses forces la falaise là-bas
dégringole soudain dans une gorge et éclaire le sentier bordé d’arbres dénudés de leurs feuillages d’automne
Parce que ce crépuscule est si triste
la solitude où mène le chemin d’un homme est lancinante
Je garde encore quelqu’un en moi, mais pour le déposer où
si l’eau de la rivière nous retient au crépuscule ?
Comme nos vêtements sont trempés de brume ô l’âne, sortons de
ce monde avec ta palmure déchirée en criant à tue-tête
La lueur vacille mais sous l’eau il y a une maison vide
Toi l’embarcadère sans batelier, t’enfonçant les pieds dans le sable fin
vas-tu enraciner ici ton cœur pour y rester résolument

Le silence

Je contemple le soir où une longue ruelle s’écoule
comme un fleuve dans la pénombre
A travers cette confusion j’ai longtemps ramé
pour avancer vers le milieu du courant, mais l’eau
inversant tout à coup son courant efface son propre cours
et je me trouve aussitôt entraîné au cœur de mon tourbillon
Je me rappelle, dans la journée un grand vent a passé
au-dessus du bosquet d’acacias sur la colline, même dans le noir
les arbres s’efforceraient-ils encore de redresser leur cime ?
De même que cette interrogation qui contrevient au temps du silence naît
du paysage du moment
une rêverie surgit dans le décor d’une fenêtre,
Un homme est entré d’un pas grave
dans un coin de la fenêtre pour disparaître hors du paysage
puis pendant un certain temps personne n’est apparu
de ce côté-là
Je songe au destin de cet homme
mais c’est une chose indicible, le silence est forcément quelque chose comme ça
Je ne vois cette obscurité qu’à travers la surface d’une fenêtre
Et là aussi le vent
se lève à l’intérieur et à l’extérieur
Même si le chemin est déjà effacé au point de ne plus le distinguer
il arrive à chacun d’entendre en pleurant
le silence du chemin qui bouillonne au fond de soi

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