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Histoire

Jo Ji-hoon, poète insoumis, défenseur de la langue coréenne

2012-07-19

<b>Jo Ji-hoon</b>, poète insoumis, défenseur de la langue coréenne
Un poète de génie écrit « Seungmu » à l’âge de 19 ans

Au temple de Yongjusa, dans la province de Gyeonggi, un jeune homme est captivé par le spectacle d’une danse rituelle bouddhique. La longue robe du moine se déploie pour former une ligne blanche dans les airs, parfois doucement, parfois vivement, exprimant la souffrance d’un ascétisme inaccessible. Ce jeune homme restera au temple jusque tard le soir, comme enchanté par cette danse.

Depuis ce jour, cette danse mystérieuse persistera dans son esprit, pour resurgir l’été suivant sous la forme d’un poème.

La coiffe de soie blanche, soigneusement repliée, vacille tel un papillon.
Une figure bleuâtre, rasée de près, voilée sous la fine coiffe,
La lueur sur ses joues est si belle qu’elle en est triste.

La bougie se consume en silence sur l’autel vide, la lune descend à chaque feuille de paulownia,
Ses longues manches volent dans le vaste ciel et ses chaussettes en étoffe blanches montent délicatement comme portées par des ailes

Soulevant doucement ses yeux noirs, elle fixe une étoile dans le ciel lointain,
Ses joues de couleur pêche ornées de deux larmes,
Souffrant des tourments du monde, mais souffrance est lueur d’étoile.


A la première lecture du poème, on imagine une danse bouddhique se dérouler devant nos yeux. Si on le récite plusieurs fois, on ressent la profonde douleur du moine à travers les rythmes traditionnels et l’esthétique du « seon », le zen coréen. Intitulé « Seungmu », la danse du moine, cette œuvre a été écrite par Jo Ji-hoon à l’âge de 19 ans.

Poète dès le plus jeune âge

Le poète prodige Jo Ji-hoon est né le 3 décembre 1920 à Yeongyang, dans la province de Gyeongsang du Nord. Dès le plus jeune âge, il apprend la littérature chinoise classique de son grand-père Jo In-seok et de son père Jo Heon-young. Il passe trois années à l’école élémentaire de Yeongyang puis étudie à l’école d’enseignement professionnel Hyehwa, qui deviendra plus tard l’université Dongguk, d’où il sortira en 1941 à l’âge de 21 ans. Bien qu’issu d’une famille très ancrée dans les traditions, Jo découvre très jeune la culture occidentale à travers des contes comme « Peter Pan », « L’oiseau bleu » ou encore « Le prince heureux ». C’est à l’âge de neuf ans qu’il commence l’écriture, des comptines principalement.

En 1931, Jo forme le club littéraire « Tour florale » avec son grand frère Jo Se-rim, et publie un recueil du même nom. C’est en 1934 qu’il commence à écrire des poèmes.

Il rejoint Séoul deux ans plus tard et publie « Jour de printemps » et « Le corps flottant sur l’eau ». Jo débute réellement sa carrière de poète en avril 1939 lorsque la revue littéraire « Phrase » recommande son poème intitulé « Robe ancienne », qui décrit l’image d’une femme traditionnelle.

Des poèmes qui chantent la langue coréenne

Au mois de novembre 1939, Jo publie « Seungmu », puis « L’angoisse du phénix » l’année suivante, dans lequel il chante la culture traditionnelle coréenne avec élégance et délicatesse. Ses poèmes sont une ode à la langue coréenne, alors menacée par l’occupant nippon qui tente de la faire interdire.

Jo Ji-hoon se prend alors de passion pour cette langue, et rédige en 1942 le grand dictionnaire du Comité de recherche sur la langue coréenne. Malheureusement, la même année, le gouvernement colonial japonais fait arrêter Jo ainsi que d’autres intellectuels coréens. Après avoir subi de rudes épreuves, il retourne dans sa ville natale et rencontre le poète Park Mok-wol avec qui il se lie d’amitié. En 1946, il publie un recueil de poèmes intitulé « Cheongrok-jip » en collaboration avec Park Mok-wol et Park Du-jin.

Jo Ji-hoon, poète insoumis

Par la suite, Jo publie d’autres recueils de poèmes et participe au projet d’écriture des premiers manuels scolaires de langue et d’histoire coréenne, en tant que membre de l’Académie de la langue coréenne. Il enseigne à l’université Korea et s’engage dans plusieurs activités liées à l’histoire et la société coréenne.

Il publie un célèbre éditorial, « Discours de la constance », dans lequel il fustige les collaborateurs pro-japonais qui, sans aucun remord, participent à la vie politique hautement corrompue des derniers temps du Parti libéral. Le texte, cinglant, n’épargne pas non plus la classe dirigeante de la société et la tendance qu’ils ont à retourner leur veste. Jo s’est également opposé à la dictature. Il meurt le 17 mai 1968, après 48 ans d’une vie de poète et de savant insoumis.

Sa vie fut courte, mais laissa une marque indélébile dans le monde littéraire. Après sa mort, on lui donna le surnom de « poète de la nation », père de poèmes aimés du peuple et qui brillent tels des joyaux dans la littérature coréenne.

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