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Culture

La poésie (9) – Moon Chung-hee (4)

2017-08-08

La poésie (9) – Moon Chung-hee (4)
« Celle qui mangeait le riz froid », recueil de poèmes de Moon Chung-hee traduits par Kim Hyun-ja avec la collaboration de Michel Collot, paru aux éditions Bruno Doucey en 2012.

* Présentation de la poétesse :
Dans les années 1970, Moon Chung-hee participe à un concours pour journalistes et remporte le premier prix. Elle s’assure ainsi d’une place de choix au sein d’un magazine féminin. Elle sera pourtant obligée de démissionner après son mariage. Dans une interview donnée à Keulmadang, revue en ligne spécialisée dans la littérature coréenne, la poétesse explique : « La société coréenne des années 70 était pleine de tabous, étranglée par un machisme qui la contrôlait et l’empêchait de s’exprimer. Mais grâce à mes poèmes j’ai réussi à chanter avec courage la vie de la femme, son monde, son rôle. En 1982, j’ai passé deux ans à étudier à l’université de New York et j’ai pu finalement apprécier, pour la première fois, la liberté, la liberté d’une femme. »

* Poème

Le fantôme

I
La nuit il ne me reste que le torse

Mon beau-père me coupe les mains pour les emporter
Ma belle-mère m’arrache les yeux pour les emporter
Ma belle-sœur me vole les paroles pour les emporter
Mon mari mes ailes
Puis quelqu’un d’autre me prend la tête
s’enfuit
et devient un fantôme en la collant sur la sienne

Il ne me reste que le torse
qui sent le sésame grillé
et j’agonise toute la nuit

Au matin je m’élève à nouveau
deviens moi-même fantôme d’un jour
C’est à cause de cette personne inconnue
qui a emporté ma tête

II
Pourquoi devient-on plus lucide la nuit ?
Je me couche comme d’habitude pour parcourir cent lieues
sur ma tête morte je pose une couronne en or
sur une autre tête j’accroche des ailes
sur une autre tête je construis une maison couverte de tuiles
sur une autre tête je montre le chemin du prince qui arrive
sur une autre tête je suspends une flûte
je puise de l’eau froide et j’élève aussi des serpents

Ainsi ma tête parcourt cent lieues
une distance infinie jusque dans les profondeurs sous-marines
que même l’arête du poisson n’atteint pas
La nuit il ne me reste que le triste torse
le torse rouge seul demeure et se tortille

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