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Culture

La poésie (9) – Moon Chung-hee (5)

2017-08-15

La poésie (9) – Moon Chung-hee (5)
« Celle qui mangeait le riz froid », recueil de poèmes de Moon Chung-hee traduits par Kim Hyun-ja avec la collaboration de Michel Collot, paru aux éditions Bruno Doucey en 2012.

* Présentation de la poétesse :
Dans un article paru dans Keulmadang, revue en ligne spécialisée dans la littérature coréenne, Véronique Cavallasca remarque que l'on retrouve chez Moon Chung-hee l'amertume des femmes de Corée dans de nombreux romans contemporains écrits par ses compatriotes féminines telles que Kim Ae-ran, Eun Hee-kyung et Shin Kyung-sook. La poétesse explique : « Après mes études universitaires, je me suis vite mariée. Le mariage m'a éclairée dans sa réalité sur l'injustice des coutumes de la société traditionnelle, trop défavorable aux femmes. J'ai été amenée à m'opposer à la tradition et aux préjugés machistes. Et j'ai réfléchi plus en profondeur sur l'amour sincère, l'individualité et la question de la vie. Depuis, j'ai écrit beaucoup de poèmes empreints de féminisme. »

* Poèmes

Petit chant de la cuisine

Dans la cuisine
ça sent toujours le vin qui fermente
L'odeur de la jeunesse d'une femme
qui se gâte
La tristesse d'une femme
fait bouillir la soupe épaisse
L'amour d'une femme
assaisonne
Dans la cuisine
on entend toujours quelque chose
qui crépite
Depuis le commencement du monde
des deux personnes debout sous le même ciel
l'une parle haut dans la grande chambre
l'autre
engagée à vie pour coucher, une bonne borgne
debout dans la cuisine
On l'entend verser de la cire brûlante sur ses pieds
Dans la cuisine ça sent le vinaigre
comme le sang d'une femme qui se gâte
Mais on ne sait depuis quand
On entend clairement
le bruit du couteau sur la planche de l'effroyable vieille femme
qui brise les entraves de ce châtiment
pareil à celui d'une bougie
qui se consume pour t'éclairer
On entend une jeune mariée timide
qui se déshabille seule
Dans notre cuisine...

Train du mariage

Tout voyage aboutit au terminus
mais ce voyage est sans terminus
Avant que la mort sépare deux personnes
quand une personne doit descendre du train
il faut lui amputer la jambe ligotée

Oh, le mariage est important
mais la vie l'est davantage
Si le mariage trouble la vie
je vais abandonner le mariage

Même la personne qui a sauté avec fermeté
après s'être amputé une jambe attachée
debout sur une seule jambe
entend bientôt sa jambe laissée dans le train
appeler lugubrement son corps
Alors il lui arrive de prendre à la hâte le prochain train

Parfois regardant dehors à travers la vitre
j'hésite à descendre à la gare prochaine
et je regarde les valises lourdes placées sur le porte-bagages
tenant les mains des enfants

De ce train confortable sans terminus
qui traverse déjà le crépuscule
comme un tunnel majestueux
ne descend aucun passager

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