Héros sauveur de la nation

Située à l’extrémité de l’Eurasie, le plus vaste continent du monde, la péninsule coréenne sert de point de départ vers l’océan Pacifique. En raison de sa situation géopolitique, la Corée a subi dans son histoire d’innombrables invasions. Pourtant, chaque fois que le pays était en difficulté, des héros sauveurs étaient là pour le protéger.

On peut citer notamment le général Eulji Mundeok qui vainquit les forces massives de la dynastie chinoise des Sui à la bataille de Salsu au 7e siècle, l’amiral Yi Sun-shin connu pour sa glorieuse victoire contre la marine japonaise à la fin du 16e siècle, le combattant anarchiste pour l’indépendance Kim Jwa-jin qui défia l’armée nipponne en 1920 à la bataille de Cheongsan-ri...

Une autre grande figure de l’histoire coréenne est Gang Gam-chan, le héros de la bataille légendaire de Gwiju durant laquelle il repoussa 100 000 soldats khitans après une attaque surprise au 11e siècle.

Né sous Megrez, l’étoile centrale de la Grande Ourse

Gang Gam-chan est né en 938 à Geumju, aujourd’hui rebaptisé Bongcheon-dong, à Séoul. Selon le mythe autour de sa naissance, une grande étoile serait tombée du ciel la nuit où il est né. Le quartier était donc nommé Nakseongdae, ce qui signifie littéralement « l’endroit où l’étoile est tombée ».

Une autre légende dans « Goryeosa Yeoljeon », biographies de l’histoire de Goryeo, décrit sa naissance comme suit :

Selon les dires, un envoyé spécial de la Chine vit une grande étoile tomber sur une maison au milieu de la nuit. Il ordonna à un de ses valets d’aller voir ce qui s’était passé : la maîtresse de la maison mit au monde un fils, qui n’était autre que Gang Gam-chan. Plus tard, quand il vit Gang, cet envoyé de la dynastie chinoise des Song le salua en disant : « Je n’ai pas vu Megrez depuis longtemps, mais je l’ai retrouvée ici. »

La quatrième étoile de la Grande Ourse, Megrez est censée contrôler le progrès de la civilisation et de la culture. Dès l’enfance, Gang apprit les arts littéraires mais aussi martiaux sous la direction de son père Gang Gung-jin, qui avait aidé le roi Taejo à fonder le royaume de Goryeo.

Après avoir perdu son père à l’âge de 17 ans, il commença une longue errance : il parcourut le pays tout se cultivant à la fois physiquement et spirituellement jusqu’à l’âge de 36 ans. En 983, il sortit de l’ombre en remportant le concours d’Etat de haut niveau.

Vers le champ de bataille

C’est d’abord en tant que fonctionnaire civil que Gang entra dans la fonction publique. Lorsque l’empereur khitan Shengzong envahit Goryeo avec 400 000 soldats, il aida le roi Hyeonjong à s’échapper du palais et s’enfuir à Naju. Il occupa plusieurs postes clé dans le gouvernement, notamment chargé de rédaction des documents diplomatiques et conseiller privé du roi.

En 1018, il fut nommé chef adjoint du Conseil suprême et gouverneur de Seogyeong, la capitale de l’Ouest du royaume, l’actuelle ville de Pyongyang. En tant que gouverneur, il était également le seul commandant en chef des armées. En effet, il s’agit d’un poste créé dans le but de se préparer à une nouvelle invasion des Khitans.

A l’époque, Goryeo entreprenait une politique d’expansion de son territoire vers le nord et maintenait de bonnes relations avec la dynastie chinoise des Song. Se sentant menacé, l’empire Khitan agressa la péninsule coréenne à deux reprises en 993 et en 1010. En septembre 1914, il envisagea une troisième invasion. Le souverain coréen désigna Gang Gam-chan comme « sangwonsu », le commandant suprême pour qu’il puisse lutter contre la troupe d’élite composée de 100 000 soldats ennemis.

Bataille de Gwiju

Gang avait plus de 70 ans à l’époque, mais il était réputé pour son ingéniosité inégalée et ses excellentes tactiques. Il bloqua le flux d’un ruisseau avec de la peau de vache. Ensuite, il détruisit le barrage et balaya ainsi les ennemis qui traversaient la rivière. Dans les environs de Gwiju, il anéantit l’armée ennemie en retraite.

Les Khitans subirent une défaite écrasante : seuls quelques milliers de soldats survécurent à la bataille. Par conséquent, ils ne purent plus jamais exiger le retour des six provinces de la région nord-ouest de Goryeo. En reconnaissance de ses exploits, Gang fut nommé Premier ministre, la plus haute fonction publique, en 1030.

La même année, il demanda au roi de lui permettre de prendre sa retraite, mettant en avant son grand âge. Ce dernier ordonna pourtant qu’il vienne à la cour tous les trois jours. Il lui fallut attendre le mois de juin de l’année suivante pour être enfin autorisé à se retirer de ses fonctions. Il mena une vie tranquille jusqu’à sa mort en 1032 à l’âge de 84 ans. Le souverain suspendit l’assemblée matinale pendant trois jours et lui accorda des obsèques nationales. Une récompense dûment méritée pour le héros qui sauva le royaume en temps de crise.